Aller au contenu

Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/28

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

n’aurait point voulu épouser une femme d’une autre tribu que de la sienne.
Nous pourrions encore rapporter une autre raison plus mystérieuse, pour montrer pourquoi on n’a rien dit de la généalogie de la Vierge, mais ce n’est pas ici le lieu de la dire, parce qu’il y a trop longtemps que nous sommes sur ce sujet.
Il vaut mieux terminer ce discours, et retenir avec soin ces points que nous avons tâché d’expliquer : Pourquoi l’Évangéliste parle d’abord de David ; pourquoi il appelle ce livre le livre de la génération du Sauveur ; pourquoi il lui donne le nom de Jésus, et de Jésus-Christ ; ce que cette naissance a de commun ou de différent avec la nôtre ; comment on fait voir que Marie était de la race de David, et enfin pourquoi on rapporte la généalogie de Joseph, et non celle de la Vierge.
Si vous avez soin de vous souvenir de ces choses, vous nous donnerez du courage pour continuer ; mais si vous êtes indifférents, et que vous laissiez tout échapper de votre mémoire, votre froideur nous rendra plus froids et plus lent dans toute la suite. Car un laboureur ne se porte pas aisément à cultiver une terre où il voit que ce qu’il sème se perd et ne lève point. C’est pourquoi je vous conjure de faire croître cette semence, puisque ce soin vous produira de grands biens pour le salut de vos âmes. Ce saint exercice vous rendra agréables à Jésus-Christ, et en méditant les paroles sorties de sa bouche, vous apprendrez à purifier la vôtre de toutes les paroles déshonnêtes et injurieuses. Nous deviendrons ainsi terribles aux démons lorsqu’ils verront notre langue armée de ces paroles de feu : nous nous attirerons une plus grande grâce de Dieu, et cette lecture assidue rendra les yeux de notre cœur plus vifs et plus éclairés.
Dieu nous a donné des yeux, une bouche et des oreilles, afin que nous les consacrions à son service, afin que nous ne parlions que de lui, que nous n’agissions que pour lui, que nous ne chantions que ses louanges, que nous lui rendions de continuelles actions de grâces, et que par ces saints exercices nous purifiions le fond de nos cœurs. Car, comme la pureté de l’air rend le corps sain, ainsi la sainteté de ces occupations rend l’âme plus sainte et plus pure.
5. Ne voyez-vous pas que les yeux nous pleurent dans un lieu plein de fumée, et qu’aussitôt que nous passons au grand air, que nous considérons la beauté des campagnes, les fleurs des prés et les eaux courantes, ils reprennent leur première vigueur ? Il en est ainsi de l’œil de l’âme. S’il se plaît dans les Écritures comme dans un pré spirituel, il deviendra plus sain, plus pur, et plus pénétrant ; mais s’il se laisse obscurcir par la fumée des choses du siècle, il se trouvera réduit à pleurer et en ce monde et en l’autre. Car tout ce qui est en ce monde est semblable à la fumée ; ce qui fait dire à David : « Mes jours se sont évanouis comme la fumée. » (Ps. 101,12) Il l’entendait de la brièveté et de l’instabilité de la vie ; mais je crois qu’on peut dire encore que les choses du monde nous aveuglent comme la fumée ; et qu’elles nous enveloppent par des liens semblables aux toiles d’araignées.
Car il n’y a rien qui blesse et qui trouble plus les yeux de l’âme que cet embarras des soins et des affaires du monde, et cette multiplicité de désirs et de passions, qui sont comme le bois qui produit ensuite cette fumée. Et comme le feu fume beaucoup lorsqu’il s’attache à une matière humide ; ainsi lorsqu’un désir ardent entre dans une âme qui est comme humide par son relâchement et par sa paresse, il faut nécessairement qu’il y excite une effroyable fumée. C’est pourquoi nous avons besoin de la rosée du Saint-Esprit, et de ce souffle bienheureux, afin d’éteindre ce feu des passions, de dissiper cette fumée, et de rendre notre cœur plus libre et plus dégagé. Car il est impossible qu’une âme appesantie de tant de soins puisse s’élever en haut pour voler au ciel. Nous devons nous dégager de tout, pour pouvoir courir dans la voie de Dieu. Et nous ne le pourrons faire à moins que d’être soulevés sur les ailes du Saint-Esprit. S’il faut donc que notre âme soit non seulement déchargée des soins du siècle, mais qu’elle soit encore soutenue de la grâce de Dieu pour nous élever en haut, comment le pourrons-nous faire, puisque, bien loin d’avoir cette disposition, nous nous engageons tous les jours dans une autre toute contraire, et qu’au lieu de voler au ciel, nous nous laissons charger de ce poids insupportable, dont le démon nous accable, et par lequel il nous entraîne toujours en bas ? Car si on voulait peser tous nos discours dans une juste balance, je ne crois pas que, pour mille talents qu’on trouverait d’entretiens tout séculiers, on pût trouver je ne dis