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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/294

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puisqu’il ne le fait qu’étant abandonné du secours de Dieu ? C’est parce qu’il n’a été abandonné de Dieu que par sa faute.
Mais pourquoi, me direz-vous, Jésus-Christ ne se contente-t-il pas de la seule foi du cœur ? pourquoi exige-t-il encore cette confession de la bouche ? Jésus-Christ le fait pour nous exciter à être courageux et intrépides. Il veut que par cette confession généreuse nous témoignions l’ardeur de notre charité, et que nous nous élevions au-dessus de tout. C’est pourquoi il parle en général à tout le monde, et il n’adresse point ici son discours seulement à ses apôtres. II ne se contente pas de les rendre généreux, mais il veut que cette même générosité passe dans tous leurs disciples. Aussi celui qui considère bien ces paroles de Jésus-Christ, non seulement publiera hardiment la vérité, mais il souffrira même de grand cœur tous les maux qui lui en pourront arriver. C’est la confiance dans ces paroles de Jésus-Christ qui a donné aux apôtres un grand nombre de disciples. Car elles nous font voir que le supplice de ceux qui auront renoncé Jésus-Christ sera effroyable ; comme la récompense de ceux qui l’auront confessé devant les hommes, sera incompréhensible. Plus les souffrances du juste se seront prolongées dans cette confession de Jésus-Christ, plus s’accroîtra pour l’éternité la somme de son bonheur ; au contraire le pécheur qui se flatte en ce monde du retard de sa peine, n’y gagnera rien, sinon de la trouver un jour augmentée d’autant plus qu’elle aura été plus retardée. Vous m’avez confessé avec courage, dira Jésus-Christ à l’un, et moi je vous promets aussi une récompense infiniment au-dessus de vos mérites. Car « je vous confesserai devant mon Père. » Et vous qui m’avez renoncé, « je vous renoncerai aussi devant les anges de Dieu. »
Vous voyez donc que c’est pour l’autre vie que Jésus-Christ réserve la dispensation des biens et des maux. Après cela pourquoi vous hâtez-vous ? pourquoi vous précipitez-vous ? pourquoi cherchez-vous ici votre récompense, vous qui selon saint Paul « êtes sauvé par l’espérance ? » (Rom. 8,30) Si vous faites quelque bien dont vous ne receviez ici aucune récompense, ne vous troublez pas, mais réjouissez-vous plutôt de ce qu’on vous en réserve une infiniment plus grande. Si au contraire vous commettez de grands crimes sans en être puni dans cette vie, ne croyez pas pour cela qu’ils demeurent impunis, puisque Dieu vous en châtiera un jour d’une manière terrible, si vous ne prévenez ici sa justice par une patience sincère et par le changement de votre vie.
Si vous ne croyez pas ce que je vous dis, jugez de l’avenir parce que vous voyez tous les jours. Car si la gloire de ceux qui confessent Jésus-Christ est si grande dans ce temps même qui est le temps du combat, quelle pensez-vous qu’elle doive être, lorsque Dieu même les couronnera ? Si dès cette vie même vos ennemis sont contraints de vous huer, combien Dieu vous relèverait-il encore davantage, lui qui vous aime avec plus de tendresse que les meilleurs pères n’aiment leurs infants, lorsque le temps de récompenser les bons et de punir les méchants sera venu ? Ceux au contraire qui, renoncent Jésus-Christ en seront punis terriblement dans l’autre monde, et ils le sont déjà dans celui-ci. Ils sont continuellement déchirés par les remords de leur conscience. Pour avoir craint une seule mort, ils meurent cent fois ; et au lieu des supplices qui auraient passé en un moment, ils se précipitent dans les éternels.
Mais ceux qui meurent en confessant Jésus-Christ sont heureux en ce monde et en l’autre. Leur mort est un gain puisqu’ils en achètent l’immortalité ; et après s’être acquis ici-bas une gloire qui est plus grande que celle de tous les hommes, ils jouissent dans le ciel d’une félicité qui est ineffable. Car Dieu est toujours prêt à récompenser comme à punir, et il est encore plus, porté à faire du bien qu’à rendre le mal. Vous me demanderez peut-être pourquoi Jésus-Christ parle ici deux fois de l’enfer, quoiqu’il ne parle qu’une fois du paradis. Il le fait parce qu’il sait que la crainte des peines arrête bien plus les hommes que l’espérance des biens. C’est pourquoi, après avoir dit : « Craignez celui qui peut perdre le corps et l’âme en les jetant dans l’enfer », il dit encore : « Je le renoncerai devant mon Père. » C’est la conduite que saint Paul a gardée en parlant continuellement des supplices de l’enfer.
Vous voyez, mes frères, comme Jésus-Christ se sert de tout pour fortifier ses disciples. Il leur ouvre le ciel, il les fait descendre jusqu’aux enfers. Il leur représente ce tribunal terrible, cette assemblée redoutable de tous les