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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/324

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Jésus-Christ, prêchant sur la montagne, veut apprendre aux hommes la loi de Dieu, il commence par l’humilité. Il confirme encore ici ce qu’il a dit alors, et il promet à cette vertu une grande récompense. Elle ne vous rendra pas, dit-il, seulement utile aux autres ; vous serez le premier qui en recevrez le fruit, puisque « vous trouverez le repos de vos âmes. » Il vous donne dès ce monde ce qu’il vous prépare en l’autre, et il vous fait goûter par avance le repos » du ciel.
3. Mais pour vous rendre plus doux et plus agréable ce qu’il vous commande, il se propose lui-même pour modèle. Que craignez-vous ? dit-il. Appréhendez-vous de paraître méprisable en vous humiliant ? Regardez-moi ; considérez-en combien de manières je me suis humilié, et vous reconnaîtrez quel bien c’est que l’humilité.
Remarquez, mes frères, par combien de raisons Jésus-Christ exhorte ses apôtres à être humbles. Il leur propose son exemple : « Apprenez de moi », dit-il, « que je suis doux et humble de cœur. » Il leur marque les récompenses des humbles : « Vous trouverez », dit-il, « le repos de vos âmes. » Il leur promet lui-même de les assister : « Car je vous soulagerai », dit-il. Enfin il les assure qu’il leur adoucira son joug : « Car mon Joug est doux, et mon fardeau est léger. » C’est ce que saint Paul tâche de persuader aux chrétiens, lorsqu’il leur dit : « Le moment si court et si léger des afflictions que nous souffrons, produit en nous le poids éternel d’une souveraine et incomparable gloire. » (2Cor. 4,17)
Mais comment, me direz-vous, peut-on appeler ce fardeau léger ; puisqu’il nous dit : « Si quelqu’un ne hait son père et sa mère et s’il ne porte sa croix et ne me suit, il n’est pas digne de moi. Si quelqu’un ne renonce à toutes choses, il ne peut être mon disciple (Lc. 14,26-29) ; » et qu’il nous commande même de donner notre propre vie ? Il faut que saint Paul vous apprenne comment ces deux choses peuvent s’allier : « Qui nous séparera », dit-il, de l’amour de Jésus-Christ ? Sera-ce « l’affliction, ou les déplaisirs, ou la persécution, ou la faim, ou la nudité, ou les périls, ou le fer et la violence ? » (Rom 8,35)
Il dit encore au même endroit : « Quand je considère les souffrances de la vie présente, je trouve qu’elles n’ont aucune pros portion avec cette gloire que Dieu doit découvrir un jour, et faire éclater en nous. » Mais passez des paroles aux actions, et considérez la joie que recevaient les apôtres, lorsqu’après avoir été fouettés dans les synagogues, ils s’en retournaient avec joie : « Parce qu’ils avaient été trouvés dignes de souffrir cette ignominie pour le nom de Jésus-Christ. » (Act. 5,54) Que si après cela vous tremblez encore en entendant ce mot de « joug et de fardeau », vous n’en devez accuser que votre propre paresse. Quand vous serez prêts à tout, et que vous vous offrirez de bon cœur à ce qui vous arrivera, tout vous paraîtra facile.
C’est pourquoi Jésus-Christ voulant nous montrer que nous devons nous efforcer de notre part à nous faire violence, évite égale ment ou de ne nous dire que des choses douces et agréables, ou de ne nous en dire aussi que de pénibles et sévères ; mais tempérant les unes par les autres, il appelle sa loi un « joug », mais un joug agréable ; et un « fardeau », mais un fardeau « léger ; » afin que vous n’en ayez ni horreur comme étant trop pénible, ni mépris comme étant trop léger.
Si donc la vertu vous paraît encore rude et austère, jetez les yeux sur les peines encore plus fâcheuses qui accompagnent la mauvaise vie. Jésus-Christ les indique assez, lorsqu’avant que de parler de son joug, il dit : « Venez à moi vous tous qui êtes fatigués et qui êtes chargés », pour montrer combien le péché est pénible, et que c’est un fardeau accablant et insupportable li ne dit pas seulement « qui êtes fatigués ; » mais il ajoute : « Qui êtes chargés », ce que David marque plus clairement en exprimant quelle est la nature du péché : « Mes iniquités se sont appesanties sur « moi comme un lourd fardeau. » (Ps. 37, 4) Et le prophète Zacharie décrivant le péché l’appelle « un talent de plomb. » (Zac. 5,9) Mais nous ne le sentons que trop par notre propre expérience. Rien ne rend l’âme si pesante, ne l’accable davantage, et ne la rend plus aveugle que le poids du péché, et la mauvaise conscience, comme il n’y a rien au contraire qui la rende plus légère, et qui l’élève plus à Dieu que la vertu.
Qu’y a-t-il de plus pénible en apparence que de ne rien posséder ? que de tendre la joue droite quand on nous a frappés sur la gauche ? que de ne point rendre le mal pour le mal, que de s’exposer à une mort violente ? Cependant