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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/342

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Christ était plus excusable, puisqu’ils ne le connaissaient pas ; au lieu qu’ils ne pouvaient ignorer le Saint-Esprit, après tant de preuves qu’ils en avaient. Car c’était par lui que les prophètes avaient prédit de Jésus-Christ tout ce qu’ils en avaient annoncé. Et généralement tous les saints de l’Ancien Testament avaient eu une grande connaissance du Saint-Esprit. Il semble donc que Jésus-Christ leur dise : Je demeure d’accord que vous ayez eu quelque sujet d’être scandalisés à mon sujet à cause de cette chair dont vous me voyez revêtu ; mais pouvez-vous dire du Saint-Esprit que vous ne le connaissez pas ? « Je vous déclare donc que le blasphème contre le Saint-Esprit ne vous sera point remis ; et vous en serez punis ici et en l’autre monde. » Plusieurs d’entre les pécheurs n’ont été châtiés qu’en cette vie, (comme le fornicateur de Corinthe et les autres Corinthiens qui participaient indignement aux saints mystères), mais vous autres vous serez punis, et en ce monde et en l’autre. Je vous pardonne toutes les injures que vous avez publiées contre moi durant ma vie ; je vous pardonne même ma mort, cet outrage sanglant de la croix ; il n’y a que votre infidélité qui ne vous sera point remise.
Il dit ceci parce que plusieurs d’entre ceux qui avaient cru en lui avant sa passion n’avaient pas une foi pleine. C’est pourquoi il est souvent obligé d’ordonner à ceux qu’il guérissait de ne le point découvrir avant sa mort ; et sur la croix même il prie son Père de pardonner à ceux qui l’y avaient attaché. Mais pour ce qui regarde, leur dit-il, les blasphèmes que vous dites contre l’Esprit-Saint, c’est un crime irrémissible. Il marque donc qu’il entend ces paroles des injures qu’on lui disait avant sa passion, lorsqu’il ajoute : « Si quelqu’un parle contre le Fils de l’homme, il lui sera remis, mais s’il parle contre le Saint-Esprit, il ne lui sera remis ni en ce siècle, ni en l’autre. » Pourquoi ? Parce que le Saint-Esprit ne vous est pas inconnu, et que vous attaquez impudemment une vérité trop claire. Car si vous dites que vous ignorez qui je suis, pouvez-vous ne pas connaître le Saint-Esprit, et pouvez-vous ignorer que chasser les démons et guérir miraculeusement les maladies, ne peut être l’ouvrage que du Saint-Esprit ? Ce n’est donc pas nous seulement que vous offensez. Vos outrages retombent sur l’Esprit-Saint. C’est pourquoi vous ne pourrez éviter d’être punis de ce crime et en ce monde et en l’autre. De tous les hommes qui sont sur la terre, les uns sont punis et en cette vie et en l’autre ; les autres ne le sont qu’ici ; les autres ne le seront qu’en l’autre monde ; enfin les autres ne le seront ni en celui-ci ni en l’autre.
Les Juifs ont été punis et en cette vie et en l’autre. Ils ont été punis ici lorsque les Romains ont assiégé leur ville et qu’ils ont souffert des maux effroyables, mais temporels, d’où ils sont passés dans les supplices éternels. Les peuples de Sodome et de Gomorrhe et plusieurs autres ont souffert de même sur la terre et dans les enfers. D’autres ne sont punis qu’en l’autre monde, comme le mauvais riche, qui, après avoir vécu dans un si grand luxe, ne trouva pas même une goutte d’eau après sa mort. D’autres ne sont punis qu’ici, comme le fornicateur de Corinthe. Et d’autres ne sont punis ni en ce monde ni en l’autre, comme les saints apôtres, comme les prophètes et comme le bienheureux Job. Car les maux qu’ils ont souffert n’étaient point la punition de leurs crimes, mais l’épreuve de leur vertu.
4. Travaillons, mes frères, à être du nombre de ces saints amis de Dieu ; et si nous ne sommes pas assez heureux pour leur ressembler, soyons au moins de ceux qui ont expié leurs péchés en cette vie. Car le tribunal de ce grand Juge sera terrible, en l’autre vie. L’arrêt de la condamnation ne se révoquera point, et les tourments seront insupportables. Si vous voulez empêcher que Dieu ne vous punisse même en cette vie, jugez-vous vous-mêmes, et punissez-vous de vos péchés. Écoutez ce que dit saint Paul : « Si nous nous jugions nous-mêmes, nous ne serions point jugés de Dieu. » (1Cor. 11,31) Si vous suivez ce conseil, et si vous vous avancez peu à peu dans cette voie, vous remporterez enfin, la couronne.
Et comment, direz-vous, pouvons-nous nous juger et nous punir nous-mêmes. ? Pleurez, soupirez dans l’amertume de votre cœur, gémissez amèrement, humiliez-vous, affligez-vous, souvenez-vous de tous vos péchés en particulier. Ce souvenir est un supplice secret et intérieur, qui n est connu que de celui qui est entre dans les sentiments d’une vive componction et qui a éprouvé combien la mémoire des fautes passées est sensible à une âme touchée d’un véritable regret. C’est pourquoi Dieu propose la justification comme le prix de cette pénitence sincère. « Accusez-vous le premier