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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/341

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qu’il soit tel par lui-même, Dieu nous garde de cette pensée ! mais pour marquer la tyrannie qu’il avait exercée jusque-là sur les hommes, dans laquelle il ne s’était affermi que par notre lâcheté et par notre faiblesse.
3. « Celui qui n’est point avec moi est contre moi : et celui qui n’amasse point avec moi dissipe au lieu d’amasser (30). » Voici la quatrième raison dont Jésus-Christ se sert pour réfuter l’accusation des Juifs. Que désiré-je, dit Jésus-Christ, si ce n’est de convertir les hommes à Dieu, de les instruire dans la vertu, et de leur annoncer un nouveau royaume ? Que veut au contraire le diable et tous les démons, sinon la perte des hommes et leur éternelle damnation ? Comment donc celui qui « n’est point avec moi, et qui n’amasse point « avec moi », pourrait-il m’aider de son secours, et contribuer à mes desseins ? Mais que dis-je, contribuer à mes desseins ? A-t-il d’autre désir que de dissiper ce que j’aurais amassé moi-même ? Est-il donc vraisemblable que celui qui non seulement ne recueille pas avec moi, mais qui tâche même de dissiper ce que j’aurais amassé, voulût s’accorder avec moi pour chasser ensemble les démons ?
Mais si cette parole de Jésus-Christ fait voir que le démon est contre lui, et qu’il travaille à détruire tout ce que fait Jésus-Christ, elle montre aussi que Jésus-Christ est toujours opposé au démon, et qu’il renverse tout ce que le démon établit. Comment doit-on entendre ces paroles : « Celui qui n’est point avec moi est contre moi ? » C’est-à-dire par cela même qu’il ne recueille et n’amasse pas avec lui. Si cela est vrai, mes frères, combien plus celui-là sera-t-il l’ennemi de Jésus-Christ, qui s’oppose à lui, et qui le combat ? Si celui qui ne s’accorde pas avec Jésus-Christ, et qui ne contribue pas à ses desseins, est son adversaire, combien plus le sera celui qui lui déclare une guerre ouverte ? Il parle de la sorte pour marquer davantage l’inimitié immortelle qui est entre lui et lé démon. Car dites-moi, je vous prie, si vous aviez un ennemi à combattre et que quelqu’un ne voulût pas vous assister contre lui, ne le regarderiez-vous pas comme un homme qui vous serait opposé ? Que si Jésus-Christ dit ailleurs : « Celui qui n’est pas « contre vous est pour vous (Lc. 9) ; » cela ne contredit pas ce qui est dit ici, car il parle ici des personnes qui sont entièrement opposées à ses disciples ; et il parle en cet autre endroit de celles qui ne seraient pour eux qu’en partie : « Nous avons vu quelqu’un qui chassait « les démons en votre nom. » (Mt. 9,22) Mais il me semble qu’ici il désigne particulièrement les Juifs qu’il met du côté des démons. Car ils étaient opposés à Jésus-Christ, et ils dispersaient tout ce qu’il avait amassé. Il déclare assez qu’il avait cette pensée lorsqu’il dit : « C’est pourquoi je vous déclare que tout péché et tout blasphème sera remis aux hommes (31). » Après s’être défendu ; après avoir satisfait à toutes les objections ; après avoir découvert l’impudence de ses ennemis, il les effraye ensuite par ses menaces. Car ce n’est pas une petite preuve du zèle qu’il avait du salut des hommes, de ne pas se contenter de se justifier devant eux et de les persuader de son innocence, mais de les intimider même par les menaces. C’est ce qu’il fait souvent à leur égard dans les avis qu’il leur donne, et dans les lois qu’il leur impose. Cette parole d’abord paraît fort obscure ; mais si nous la considérons avec soin, nous n’y trouverons plus de difficulté. Il est donc important de la peser et de la bien examiner : « Tout péché », dit-il, « et tout blasphème sera remis aux hommes. » « Mais le blasphème contre le Saint-Esprit ne leur sera point remis (31). Et si quelqu’un parle contre le Fils de l’homme, il lui sera remis, mais s’il parle contre le Saint-Esprit, il ne lui sera remis ni en ce siècle ni en l’autre (32). » Que veut-il dire par ces paroles ? Vous avez, leur dit-il, publié contre moi plusieurs choses. Vous avez dit que j’étais un séducteur et un ennemi de Dieu. Je vous pardonne ces excès, et je ne vous en punirai point si vous en faites pénitence, mais le blasphème contre le. Saint-Esprit ne sera point remis à ceux même qui en feront pénitence. Quoi donc ! ce blasphème ne sera-t-il point pardonné même à ceux qui s’en repentiront ? Qui pourrait raisonnablement le croire, après que nous avons vu effectivement ce crime pardonné à ceux qui se sont repentis de l’avoir commis ? Plusieurs de ceux qui avaient blasphémé ainsi contre Jésus-Christ, ont ensuite cru en lui, et Dieu leur a pardonné leurs crimes.
Qu’est-ce donc que Jésus-Christ veut faire entendre par ces paroles, sinon que ce péché était de tous celui qui se pardonne le moins ? Car celui qu’ils commettaient contre Jésus-