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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/353

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pour eux la mort, et une mort honteuse, et je leur envoie encore après moi mes apôtres pour achever mon ouvrage. Enfin Jonas était un étranger inconnu aux Ninivites ; et moi je suis de la même race que les Juifs, et j’ai selon la chair les mêmes aïeux qu’eux. On pourrait trouver ainsi d’autres avantages de la prédication de Jésus-Christ sur celle de Jonas, si on s’arrêtait à les bien, considérer. Mais Jésus-Christ ne se contente pas dé cet exemple. Il en joint aussitôt un autre.
3. « La reine du midi s’élèvera au jour du jugement contre ce peuple, et le condamnera, parce qu’elle est venue des extrémités de la terre, pour entendre la sagesse de Salomon, et cependant celui qui est ici est plus grand que Salomon (42). » Cet exemple est encore plus puissant que e premier. Car Jonas au moins alla trouver les Ninivites, mais la reine du midi n’attendit pas que Salomon la vînt trouver. Elle le prévint et le visita dans son royaume. Elle ne considéra ni son sexe, ni sa qualité d’étrangère, ni l’éloignement des lieux. Elle se résolut à ce long voyage, non par la terreur des menaces, ni par la crainte de la mort, mais par le seul amour de la sagesse : « Et cependant celui qui est ici est plus grand que Salomon. »
Là c’est une femme qui va trouver un roi ; ici au contraire c’est un Dieu qui cherche des hommes. Elle vient trouver Salomon des extrémités de la terre ; et moi, descendu du haut du ciel, je viens vous chercher dans vos bourgs et dans vos villes. Salomon discourait sur les arbres et sur les plantes, ce qui ne pouvait pas être fort utile à celle qui le venait chercher ; et moi je vous annonce des choses également terribles et salutaires.
Après donc les avoir mis dans leur tort, et leur avoir prouvé par tant de raisons, qu’ils ne méritaient point le pardon de leurs péchés ; après avoir montré et par l’exemple des Ninivites, et par celui de la reine du midi que leur désobéissance et leur incrédulité ne venait pas de la faiblesse du maître qui les instruisait, mais de leur opiniâtreté inflexible ; il leur déclare enfin le châtiment qui devait fondre sur eux. Il ne le fait que par des énigmes obscures, mais qui ne laissent pas d’imprimer la crainte dans les esprits. « Lorsque l’esprit impur est sorti d’un homme, il s’en va par des lieux arides cherchant du repos, et il n’en trouve point (43). Alors il dit : Je retournerai dans ma maison d’où je suis sorti, et venant il la trouve vide, nettoyée et bien parée (44). En même temps il s’en va prendre avec lui sept autres esprits plus méchants que lui, et entrant dans cette maison ils y habitent. Et le dernier état de cet homme devient pire que le premier. C’est ce qui arrivera à cette race (45). » Jésus-Christ montre clairement par ces paroles que les Juifs souffriraient d’étranges tourments, non seulement dans l’autre monde, mais même dès celui-ci. Comme il leur avait dit que les Ninivites s’élèveraient contre eux au jour du jugement, et qu’ils les condamneraient, de peur que ces menaces si éloignées ne fissent pas une assez forte impression sur eux pour les tirer de leur négligence, il leur marque les maux qui devaient leur arriver dès cette vie.
Le prophète Osée leur avait prédit aussi ces malheurs, lorsqu’il leur dit : « Qu’ils seraient « comme un prophète et comme un homme « qui aurait perdu le sens et qui serait possédé « d’un mauvais esprit. » (Os. 8,7) C’est-à-dire, comme des furieux, comme des démoniaques, et comme des faux prophètes possédés du malin esprit. Car Os. par ce mot de « prophète », entend ici les faux prophètes, comme sont les devins et autres semblables. C’est ce que Jésus-Christ montre ici, lorsqu’il dit que les Juifs souffriraient les dernières extrémités. Considérez comme il tente toutes sortes de voies pour forcer ce peuple à l’écouter. Il les presse de tous côtés. Il leur représente le présent et l’avenir ; il les stimule par de beaux exemples comme ceux des Ninivites et de la reine du midi : il les effraie par l’exemple de ceux qui ont péché comme du peuple de Tyr et de Sodome. C’est ce qu’ont fait tous les prophètes, lorsqu’ils ont proposé aux Juifs, tantôt l’exemple « des Réchabites (Jer. 35,8) » ; tantôt celui d’une « épouse » qui ne peut oublier ses ornements (Os. 24) ; tantôt celui « du bœuf » qui connaît son maître, et « de l’âne » qui n’ignore pas l’étable de celui qui le nourrit. (Is. 1) Jésus-Christ suit donc ici la coutume de ces hommes éclairés de Dieu ; et après avoir fait connaître aux Juifs l’excès de leur ingratitude, en les comparant avec d’autres moins ingrats qu’eux, il leur déclare enfin quels seraient les tourments dont cette ingratitude sera punie.