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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/379

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contraire, aussi bien que dans la parabole de l’ivraie, que ce discernement se fera par les anges. « C’est ce qui arrivera à la fin du monde. Les anges viendront et sépareront les méchants des justes (49), et les jetteront dans la fournaise du feu ; c’est là qu’il y aura des pleurs et des grincements de dents (50). » Le Sauveur parle quelquefois à ses disciples d’une manière plus simple et plus commune, et quelquefois aussi d’une manière plus élevée. Il interprète de lui-même cette parabole des poissons sans attendre qu’on l’interroge, pour inspirer encore plus de terreur. Car afin que vous ne croyiez pas qu’une fois jetés dehors les mauvais poissons n’auront plus rien à craindre, qu’ils en seront quittes pour une simple séparation, Jésus-Christ montre le châtiment qui les attendent dehors en disant qu’ils « seront jetés dans la fournaise du feu », et il marque la violence de la douleur qu’ils souffriront en disant : « Là il y aura des pleurs et des grincements de dents. »
Considérez, je vous prie, mes frères, par combien de voies on peut se perdre. On se perd comme les semences ou « dans le chemin », ou « dans les pierres » ; ou « dans les épines. »
On se perd par l’ivraie ou l’hérésie. On se perd enfin, comme les mauvais catholiques, dans « le filet » de l’Église. Après cela est-ce sans sujet que le Fils de Dieu dit : « Que la voie qui mène à la perdition est large, et que beaucoup y entrent ? » (Mt. 7,13)
Ayant donc achevé ces paraboles et terminé ce long discours par la crainte, il l’augmente encore en s’étendant sur ce sujet et disant : « Avez-vous entendu tout ceci ? Oui, Seigneur, « répondirent-ils (54). » Et les louant de ce qu’ils l’avaient compris, il ajoute : « C’est pourquoi tout docteur qui est bien instruit en ce qui regarde le royaume des cieux, est semblable à un père de famille qui tire de son trésor des choses nouvelles et anciennes (52) »
3. Le Fils de Dieu dit ailleurs : « Je vous enverrai des sages et des scribes. »(Mt. 23,34) Ainsi on voit qu’il ne rejette point l’Ancien Testament, mais qu’il le loue au contraire en l’appelant « un trésor ». Tous ceux donc qui sont ignorants dans l’Écriture sainte ne seront jamais du nombre des vrais « pères de famille. » Ce sont des lâches qui ne savent rien par eux-mêmes, et qui ne veulent rien apprendre des autres. Ainsi ils meurent de faim, et ils périssent sans qu’ils s’en aperçoivent. Mais ceux-là ne seront pas exclus seuls de cette béatitude. Les hérétiques encore n’y auront aucune part ; parce qu’ils « ne tirent point de leur trésor de choses nouvelles et anciennes. » En rejetant la loi ancienne, ils ne peuvent non plus suivre « la nouvelle » comme ceux qui rejettent « la nouvelle » se vantent en vain d’avoir « l’ancienne ». Ainsi en séparant l’une de l’autre, ils sont privés de l’une et de l’autre.
Écoutons ceci, mes frères, nous tous qui négligeons de lire l’Écriture sainte, comprenons quel tort nous nous faisons à nous-mêmes et dans quelle pauvreté nous nous jetons. Car comment nous pourrons-nous appliquer à la pratique de la piété, puisque nous n’en savons pas même les règles ? Les personnes riches et avares ont soin de visiter souvent leurs mets-hies et leurs habits précieux pour empêcher qu’ils ne se gâtent, ou que les vers ne les mangent. Mais vous, lorsque votre âme se perd par l’oubli de ses devoirs, lorsque le ver de l’ingratitude la dévore, vous ne pensez point à avoir recours à ces livres saints pour vous guérir de cette langueur, et pour embellir votre âme, en traçant en elle une image de la vertu où sa tête et tous ses membres soient parfaitement représentés. Car la vertu est comme un corps d’une excellente beauté. Ce corps a sa tête et ses autres parties qui le composent, mais si belles et si agréables qu’il n’y a rien d’égal dans toutes les autres beautés du monde.
La tête de ce corps divin c’est l’humilité : c’est pourquoi Jésus-Christ commence les béatitudes par celle-ci : « Bienheureux sont les pauvres d’esprit. » (Mt. 5,3)
Cette tête n’est point ornée par des cheveux bouclés et frisés, et néanmoins elle a tant d’agréments, qu’elle attire sur elle les yeux de Dieu même : « Sur qui », dit-il, « jetterai-je mes regards, sinon sur celui qui est doux et humble, et qui tremble à la moindre de mes paroles ? » (Is. 66,4) Et ailleurs : « Mes yeux sont sur les doux et sur les humbles de la terre. » (Ps. 33,17) Et ailleurs : « Le Seigneur est proche de ceux qui ont le cœur brisé. » (Ps. 34,16) L’ornement et la couronne de cette tête