Aller au contenu

Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/490

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

n’avions pas. Il a fait pour nous toutes les créatures visibles, le ciel, la mer, la terre et l’air ; tout ce qui y est contenu, les animaux, les plantes et les semences. Vous voyez que nous ne faisons que marquer les principaux d’entre les dons de Dieu, parce qu’ils s’étendent jusqu’à l’infini. Il a inspiré dans l’homme une âme vivante, et l’homme a été le seul sur la terre qu’il ait honoré d’un si grand don. Il a fait pour lui le paradis terrestre. Il lui a donné une compagne pour l’aider, il lui a assujetti tous les animaux ; enfin il l’a couronné d’honneur et de gloire. Après tout cela l’homme est tombé dans le péché ; et, quoiqu’il eût payé d’une si extrême ingratitude les bienfaits de son Créateur, il lui en a fait néanmoins ensuite de plus grands encore.
2. Car il ne faut pas considérer seulement la justice de Dieu, lorsqu’il a chassé l’homme du paradis ; mais encore la bonté avec laquelle il l’a traité ensuite pour le rendre digne d’y rentrer. Il l’a comblé de grâces et de bienfaits dans son bannissement même, et après lui avoir procuré tant de divers secours par la lumière de la loi et par l’instruction des prophètes, il nous a enfin envoyé son Fils pour nous ouvrir le ciel, pour nous faire rentrer dans le paradis, pour nous tirer de l’esclavage du péché, et pour mettre au rang de ses enfants des ingrats et des ennemis déclarés. C’est ce qui nous oblige de nous écrier avec saint Paul : « O profond abîme des trésors de la sagesse et « de la connaissance de Dieu » ! (Rom. 2,33) Il a ensuite lavé nos péchés dans les eaux sacrées du baptême. Il nous a délivrés de la colère et de la vengeance de Dieu. Il nous a donné part à l’héritage de son royaume, il nous a comblés de biens, il nous a tendu la main pour nous soutenir dans nos faiblesses, et il a répandu son Saint-Esprit dans nos cœurs.
Après tant de grâces et tant de bienfaits, quelle devrait être notre reconnaissance, mes frères ? Dans quelle disposition devrions-nous être à l’égard d’un Dieu si doux ? Quand nous mourrions tous les jours pour celui qui nous a tant aimés, que lui rendrions-nous qui pût être digne de lui ? Nous acquitterions-nous envers lui de la moindre partie de ce que nous lui devons ? Et cette mort, même si avantageuse pour nous, ne serait-elle pas une nouvelle faveur qui nous rendrait encore plus redevables à sa bonté ? Il serait raisonnable que nous eussions ces sentiments, mais dans quelle disposition sommes-nous ? Nous déshonorons Dieu tous les jours de notre vie, et nous violons toutes ses lois. C’est pourquoi je vous prie encore une fois, mes frères, de souffrir que je parle avec liberté et avec force contre ceux qui l’offensent et qui le méprisent. Ce n’est pas vous seuls que j’accuserai, je m’accuserai aussi moi-même.
Je ne sais d’abord par qui commencer à me plaindre ; sera-ce par les personnes libres ou par les esclaves ; par les gens de guerre ou, par ceux des villes ; par ceux qui commandent ou par ceux qui obéissent ; par les hommes ou par les femmes ; par les vieillards ou par les enfants ? Je vois de grands désordres dans cette diversité d’âges, de conditions et d’états. Par où commencerai-je ? Commençons si vous voulez par les gens de guerre. Car peut-on nier qu’ils ne commettent de grands excès contre Dieu, par tant d’outrages et tant de violences qu’ils font tous les jours, s’enrichissant de vols et de brigandages, et cherchant leur bonheur dans la misère des autres ? Ce sont des loups plutôt que des hommes. Ils se repaissent de sang et de carnage, et leur âme est comme une mer qui est sans cesse agitée par les tempêtes des passions. Y a-t-il des désordres dont ils soient exempts ? Y a-t-il un vice qui ne règne en eux ? Ils sont altiers et insolents ; ils sont jaloux de leurs égaux, et insupportables à ceux qui leur sont soumis ; et ils traitent en esclaves et en ennemis ceux qui ont recours à eux pour y trouver leur protection et leur sûreté. Que voit-on parmi eux, que des rapines, des violences, des calomnies, des mensonges honteux et des flatteries lâches et serviles ?
Que serait-ce si à chacun de leurs désordres nous opposions la loi de Jésus-Christ ? Si nous disons qu’il est écrit dans l’Évangile : « Qui dira à son frère : vous êtes un fou, sera coupable du feu d’enfer ; qui regardera une femme avec un mauvais désir, a déjà commis l’adultère dans son cœur ; si on ne s’humilie comme un petit enfant on n’entrera point dans le royaume du ciel » ? Ces hommes traitent ceux qui sont au-dessous d’eux, avec un orgueil et un empire effroyable, afin qu’ils tremblent toujours devant eux. Ils sont pires envers les hommes que les bêtes les plus farouches. Ils sont bien éloignés de rien faire pour l’amour de Jésus-Christ. Ils ne font rien que pour