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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/525

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celui qui n’a aucun accès ni aucune confiance auprès de lui ? Vous me demandez quelles sont ces hosties et ces sacrifices que l’humble peut offrir à Dieu. L’Écriture le dit : « L’esprit affligé est un sacrifice à Dieu, Dieu ne méprisera pas un cœur contrit et humilié »(Ps. 50,17) Vous voyez donc quelle est la pureté de l’esprit humble, et par, conséquent quelle doit être l’impureté de l’esprit superbe. Car toute âme qui est infectée d’orgueil, est impure devant Dieu.
Nous voyons aussi dans l’Écriture que Dieu proteste qu’il trouve son repos dans l’humble. « Sur qui jetterai-je les yeux », dit-il, « et sur qui me reposerai-je, sinon sur celui qui est doux et humble, qui tremble à la moindre de mes paroles » ? (Is. 66,2) Ainsi l’humble demeure avec Dieu, et le superbe habitera avec le démon. C’est ce qui a fait dire à saint Paul : « Que celui qui s’enfle d’orgueil, tombera dans le jugement et dans la condamnation du diable ». (1Tim. 3,6) Mais ce qui est encore plus étrange, c’est qu’il arrive à celui qui est possédé de cette passion tout le contraire de ce qu’il désire. Il a de hauts sentiments de lui-même. Il veut être honoré de tous, il est au contraire méprisé de tous. Sa vanité le rend ridicule, il a tous les hommes pour ennemis, il n’a personne qui le soutienne, il est l’esclave de la colère, il a une source d’impureté dans le cœur. Qu’y a-t-il de plus misérable qu’une telle vie ? Mais y a-t-il au contraire rien de plus heureux que celui qui est humble ? Il est aimé de Dieu : il est honoré des hommes sans qu’il le désire. Tous le respectent comme leur père, tous le considèrent comme leur frère ; et tous le chérissent comme la prunelle de leur œil. Devenons donc humbles et petits pour devenir grands. Fuyons l’abîme où l’orgueil nous précipite. C’est cette passion qui a perdu Pharaon. Eu se vantant de ne point connaître Dieu, il devint plus méprisable que les rats, que les grenouilles et que les mouches qui le tourmentèrent avec son peuple : et il fut enfin abîmé dans la mer avec toute son armée.
Abraham ; au contraire, en reconnaissant de tout son cœur « qu’il n’était que terre et que cendre (Gen. 14) », défit une grande armée de barbares. Étant tombé entre les mains des Égyptiens, Dieu fit un grand miracle pour sauver sa vie et l’honneur de sa femme. II s’attacha toujours à cette vertu, et il crût en grandeur à proportion qu’il croissait en humilité. C’est cette vertu qui l’a couronné, et qui l’a rendu et le rendra célèbre dans la succession de tous les siècles. Pharaon au contraire n’est maintenant qu’un objet d’exécration et d’horreur, et on le foule aux pieds comme de la terre et de la boue. Car Dieu ne hait rien tant que la présomption et l’orgueil. Il a fait toutes choses dès le commencement du monde, pour déraciner de notre cœur cette passion. C’est pour ce sujet que l’homme est devenu mortel, que sa vie est accompagnée de tant de douleurs et de misères, et que Dieu l’a condamné à travailler sans cesse, et à gagner sa vie à la sueur de son visage. N’est-ce pas cette même passion qui perdit le premier homme ? Elle lui fit espérer d’être égal à Dieu, et en lui promettant ce qu’il n’avait pas, elle lui fit perdre ce qu’il avait. Car c’est là l’effet ordinaire de l’orgueil. Il ne nous donne point ce qu’il nous promet faussement, et il nous ravit ce que nous avions. L’humilité fait tout le contraire ; elle conserve tous les biens de l’âme, et elle lui en donne encore de nouveaux. Aimons donc cette vertu, mes frères. Travaillons avec ardeur pour l’acquérir et la conserver, afin qu’elle nous rende heureux et dans cette vie et dans l’autre, par la grâce et la miséricorde de Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui, avec le Père et le Saint-Esprit, est la gloire et l’empire dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il.