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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/529

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Jésus-Christ, et à cette foi qui a donné ensuite de l’émulation aux juifs. C’est pourquoi on voit ici que cette ânesse suit l’ânon, parce que, lorsque Jésus-Christ s’est reposé parmi les gentils, les juifs, excités par leur exemple, ont voulu aussi embrasser la foi. Saint Paul marque cette vérité, lorsqu’il dit : « Qu’une partie des juifs est « tombée dans l’endurcissement, afin que la « multitude des nations entrât cependant dans « l’Église et qu’ainsi tout Israël fût sauvé ». (Rom. 11, 25)
Pour faire voir encore que tout ce qui se passait ici était une prophétie, il ne faut que considérer toutes les paroles de cette histoire.
Car sans cela qui croirait que le Prophète se fût arrêté à parler si particulièrement « d’un petit ânon » ? Ce qui confirme encore ceci, c’est que les apôtres ne trouvent aucune résistance, lorsqu’ils veulent « délier » ces animaux : ce qui marquait que dans l’établissement de l’Église, rien ne les empêcherait de rompre les liens des gentils, et de les affranchir de l’idolâtrie : « Les disciples donc s’en étant allés, firent ce que Jésus leur avait commandé (6) ; et amenèrent l’ânesse et l’ânon, et les ayant couverts de leurs vêtements, le firent monter dessus (7) : Or, une grande multitude de peuple couvrit le chemin de ses vêtements. Les autres coupaient des branches d’arbres et les jetaient par où il passait (8). Et tout le peuple, tant ceux qui allaient au-devant de lui que ceux qui le suivaient, criaient : Hosanna, salut et gloire au Fils de David. Béni soit Celui qui vient au nom du Seigneur : Hosanna, salut et gloire lui soit au plus haut des cieux (9) ».
Jésus-Christ ne s’assied sur l’ânon qu’après que les apôtres l’ont couvert de leurs vêtements. Car ils se dépouillèrent eux-mêmes de bon cœur pour le revêtir. C’est ce que marque saint Paul, lorsqu’il dit : « Pour ce qui est de moi, je donnerai très volontiers tout ce que j’ai, et je me donnerai encore moi-même pour le salut de vos âmes ». (2Cor. 12,45) Mais considérons encore comment cet ânon, qui n’avait point été dompté, ni assujetti au frein, ne regimbe point cependant, mais se soumet paisiblement à tout ce que lui demande Celui qui le monte. Dieu nous marquait par cette figure quelle devait être l’obéissance des gentils, et comment ils devaient passer en un moment d’une vie toute déréglée à une vie sainte. C’est cette parole toute-puissante qui fait tout : « Déliez-le et amenez-le-moi ». C’est elle qui a mis l’ordre dans le dérèglement du monde, et qui a purifié les âmes impures.
3. Mais qui pourrait ne pas s’étonner de la bassesse d’esprit que les juifs témoignent. Après une multitude infinie de toutes sortes de miracles, rien ne les surprend tant que cette action. Ils admirent que tout le peuple coure après lui : « Et comme il entrait à Jérusalem, toute la ville s’émut en disant : Qui est celui-ci (10) ? Mais le peuple disait : C’est Jésus le prophète qui est de Nazareth, en Galilée (11) ». Lorsqu’ils croient élever le Sauveur, et dire quelque chose de fort considérable à sa louange, c’est alors qu’ils ne témoignent que de la bassesse. Jésus-Christ se fait rendre cet honneur par ce peuple, non parce qu’il aimait la pompe et le faste, mais pour accomplir les prophéties, et pour nous donner un modèle de vertu. Il voulait encore consoler ainsi ses apôtres, afin qu’ils crussent à sa mort – qu’il ne serait outragé qu’autant qu’il voudrait, puisqu’il s’était fait rendre tous les honneurs qu’il lui avait plu pendant sa vie. Remarquez encore avec quelle exactitude le Prophète décrit toute cette histoire, et combien David et le prophète Zacharie en avaient marqué toutes les circonstances.
Imitons, mes frères, ce peuple qui reçoit aujourd’hui le Fils de Dieu en triomphe. Chantons comme lui ses louanges, et offrons-lui ce que nous avons pour l’honorer. Ce peuple donne ses vêtements, ou pour couvrir l’âne sur lequel Jésus-Christ est monté, ou pour les étendre sous ses pieds, et nous autres, nous le voyons nu lui-même en la personne de ce pauvre, sans que nous pensions à le revêtir, quoiqu’il ne soit pas besoin pour cela de nous dépouiller, mais seulement de lui donner un peu de ce que nous avons de trop. Ce peuple s’empresse pour (aire honneur à Jésus-Christ, les uns en marchant devant lui, et les autres en le suivant, et nous autres, au contraire, nous le rebutons avec mépris et avec injure lorsqu’il s’approche de nous. De quels tourments devrait être puni un outrage si horrible ?
Votre Seigneur et votre Maître se trouve réduit dans un extrême besoin, il approche de vous pour recevoir quelque assistance, et vous ne voulez pas même écouter sa prière vous le querellez, vous lui insultez, vous rendez