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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/589

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à ne plus boire de vin, et à retrancher toutes les voluptés ?
Après cela, qui n’admirera l’art et la sagesse de ces médecins spirituels, qui vous donnent en même temps la santé et les richesses ? Allez donc vous présenter à eux. Apprenez d’eux la qualité et la nature de votre mal. Si vous êtes possédé de l’avarice, si vous désirez l’argent avec autant d’ardeur qu’un homme qui a la fièvre désire un verre d’eau froide, écoutez ce qu’ils vous diront pour guérir ce mal. Comme les médecins des corps vous prédisent ce qui vous arrivera si vous suivez vos désirs déréglés, saint Paul vous dit de même : « Que ceux qui veulent devenir riches tombent dans la tentation et dans le piège, et en diverses passions insensées et pernicieuses, qui précipitent les hommes dans l’abîme de la perdition et de la damnation ». (1Tim. 6,9) Si vous êtes sujet à l’impatience, écoutez encore ce qu’il vous dira sur ce sujet : « Dans fort peu de temps », dit-il, « celui qui doit venir viendra et ne tardera point. Le Seigneur est proche, ne soyez en peine de rien ». (Héb. 10,37, Phil. 4) Et ailleurs : « La figure de ce monde passe ». (1Cor. 7,31)
Car ce grand Apôtre ne se contente pas de nous donner seulement des avis si sages et des conseils si salutaires. Il nous console encore comme un bon père, et il adoucit toutes nos peines : et comme les médecins des corps ont des remèdes pour désaltérer leurs malades et pour suppléer à l’eau fraîche qu’ils leur défendent ; celui-ci de même substitue à nos désirs et à nos affections déréglées d’autres désirs et d’autres affections plus justes et plus innocentes. Désirez-vous, nous dit-il, de vous enrichir ? Je ne vous défends point d’être riches en toutes sortes de bonnes œuvres. Voulez-vous amasser de grands trésors ? Mettez-les en dépôt dans le ciel. Et comme les médecins disent encore que les choses froides nuisent aux os, aux nerfs et aux dents, saint Paul de même dit en un mot avec une brièveté toute divine, que « l’avarice est la source de tous les maux ». (1Tim. 6,10)
Que devons-nous donc faire, me direz-vous ? Ce même apôtre vous l’a marqué : Il dit qu’il faut au lieu de l’avarice aimer la modération. « C’est une grande richesse », dit-il, « que la piété et la modération d’un esprit qui se contente de ce qui suffit ». (1Tim. 6,11) Si vous ne suivez pas cet avis, et si le désir d’amasser du bien vous empêche de donner votre superflu, vous trouverez encore des avis pour cette maladie : « Que ceux », dit-il, qui « se réjouissent soient comme ne se réjouissant point ; ceux qui achètent comme ne possédant point, et ceux qui usent de ce monde comme n’en usant point. » (1Cor. 7,30) Vous voyez donc quels sont ces avis si saints que ce saint médecin du ciel nous donne pour nous guérir.
Voulez-vous maintenant que nous en consultions un autre ? On ne doit point craindre à propos de ces médecins ce qui arrive pour les médecins du corps, qui sont assez souvent cause, par leur ambition et par leur jalousie, de la mort de leurs malades. Ceux-ci n’ont point d’autre but que la santé de ceux qui les appellent et qui les consultent, et ils ne se proposent jamais pour fin leur réputation et leur propre gloire. Ne craignez donc point leur grand nombre. Ils sont plusieurs, et ils ne sont qu’un, puisque Jésus-Christ seul parle par eux tous. Écoutons encore un autre médecin, saint Matthieu, qui parle terriblement de cette même maladie de l’avarice : ou plutôt écoutons Jésus-Christ, dont il rapporte ces paroles redoutables : « Vous ne pouvez servir en même temps Dieu et l’argent ». (Mt. 6,24)
5. Mais comment cela se pourra-t-il faire, me direz-vous, et comment pourrons-nous étouffer tous ces désirs ? Voyez ce qu’il vous dit au même endroit : « Ne vous faites point de trésors dans la terre, où les vers et la rouille les mangent, et où les voleurs les déterrent et les dérobent ». (Id. 6,9) Vous voyez, mes frères, combien Jésus-Christ s’efforce de nous éloigner du désir des biens d’ici-bas, parla considération du lieu ou nous les mettons en dépôt ; de la terre et des accidents qui nous les font perdre, tels que les vers, la rouille et les voleurs, afin que cette vue nous porte à prendre pour le dépositaire de tous nos trésors, Dieu même qui nous les gardera avec une sûreté entière. Car si vous vouiez mettre vos richesses dans un lieu où ni la rouille ni les voleurs ne leur puissent nuire, vous vous guérirez sans peine de votre avarice, et votre âme s’enrichira des biens véritables et spirituels.
Jésus-Christ ajoute à cela un exemple étonnant et capable de vous toucher. Il imite les médecins qui, craignant pour leurs malades, leur disent : Un tel est mort pour avoir bu de l’eau froide dans ses accès. (Mt. 19) C’est