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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/141

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Il ne tentait pas Dieu, et ne se précipitait pas lui-même dans la persécution. Les apôtres ne firent ainsi que lorsqu’ils en eurent reçu l’ordre, par exemple lorsque l’ange leur eût dit : « Entrez dans le temple et parlez au peuple ». (Act. 5,20) Les apôtres entendirent ces paroles, et aussitôt ils obéirent. Mais ici l’ange ne dit rien de semblable à Pierre, il lui donna seulement la permission de s’éloigner après l’avoir fait sortir en silence et enlevé pendant la nuit. Et les choses se passent ainsi 'pour nous apprendre qu’en maintes occasions les apôtres, pour éviter de tomber en péril, se sont conduits suivant les lumières de la prudence humaine. Afin que les disciples, après son départ, ne disent pas que c’était son ange, ils le disent tout d’abord, et ils le voient ensuite lui-même, et il leur enlève cette opinion. Si c’eût été un ange, il n’eût pas frappé à la porte, il ne se fût pas retiré dans un autre lieu. Le fait paraît même plus croyable que s’il se fût passé en plein jour. Eux qui étaient libres demeuraient en prière, lui qui, était dans les chaînes dormait ; s’il eût pensé que ce qui se faisait fût la vérité, il en eût été effrayé et n’en aurait pas gardé le souvenir ; mais, croyant à un songe, il ne se troubla pas. « Ils arrivèrent près de la porte de fer ». Vous voyez si elle était solide. «, Ayant traversé la première et la seconde garde, ils arrivèrent à la porte de fer ». Et pourquoi, direz-vous, les apôtres ne font-ils pas ces prodiges par eux-mêmes ? Pourquoi ? Parce qu’en les délivrant par le moyen de ses anges, Dieu les honore. Quoi donc, Paul ne fût-il pas délivré sans l’intervention d’un ange ? Oui, mais il y avait une raison à cela ; il s’agissait alors de convertir le geôlier, et, dans le cas présent, il s’agissait seulement de délivrer l’apôtre ; d’ailleurs, Dieu accomplit ses œuvres de diverses manières. Là, Paul chantait des hymnes ; ici, Pierre dormait. Ne cachons donc pas lés merveilles de Dieu, mais efforçons-nous de les célébrer pour notre propre utilité, et aussi pour l’édification des autres. De même que celui qui préféra être dans les chaînes est admirable, plus admirable encore est celui qui ne s’éloigna pas avant d’avoir annoncé tout à ses frères. « Et il dit : Annoncez cela à Jacques et aux frères ». Pourquoi cette recommandation ? Afin qu’ils se réjouissent et ne soient pas dans l’inquiétude ; et aussi pour que les apôtres apprennent la nouvelle par les disciples, et non ceux-ci par les apôtres. Ainsi il s’occupait des plus humbles. Rien n’est donc préférable à une légère affliction. Dans quel état pensez-vous que fût alors leur âme ? De combien de joie ne fût-elle pas remplie ?
Où sont maintenant les femmes qui dorment toute la nuit ? Où sont les hommes qui ne se retournent pas même sur leur lit ? Voyez-vous une âme vigilante ? Rendus plus purs que le ciel par la persécution, les disciples chantaient des hymnes au Seigneur avec es femmes, les serviteurs et es servantes. Maintenant, lorsque nous voyons un petit danger, nous nous laissons abattre. Rien de plus splendide, que cette église. Soyons les imitateurs et les émules de ces chrétiens. La nuit n’a pas été faite pour que nous dormions et soyons oisifs pendant toute sa durée : témoin les artisans, les âniers, les marchands, et l’Église de Dieu qui se lève pendant la nuit. Levez-vous donc, vous aussi, et contemplez le chœur des astres, le silence profond, et le calme immense de la nuit ; admirez avec transport la sagesse du Maître de la nature. Alors l’âme est plus pure : elle est surtout plus légère, plus subtile. Les ténèbres elles-mêmes, le profond silence sont propres à produire la componction. Si vous contemplez le ciel comme semé d’yeux innombrables par les astres, vous goûterez une joie infinie en pensant d’abord au Créateur. Si vous pensez que ceux qui crient tout le jour, rient, dansent, sautent, commettent l’injustice, menacent, s’adonnent à l’avarice et à tous les vices ; si vous pensez, dis-je, que tous ces hommes ne diffèrent plus en ce moment des morts, vous prendrez en pitié cette vie mondaine à la fois si vaine et si fastueuse. Le sommeil vient, il triomphe de la nature ; il est l’image de la mort, il est l’image de la consommation de toutes choses. Vous regardez dans la rue, vous n’entendez aucune voix ; si vous arrêtez vos regards sur votre demeure, vous voyez tout le monde, comme étendu dans un sépulcre. Toutes ces choses sont propres à fortifier l’âme, et à la faire penser à la consommation universelle.
4. Voici ce que j’ai à dire aux hommes et aux femmes. Fléchissez les genoux, gémissez, priez le Seigneur de vous être propice. Il se laisse mieux fléchir par ces prières nocturnes, lorsque vous faites du temps du repos le temps des larmes. Rappelez-vous la parole d’un roi (130) : «