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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/15

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humble, et c’est la même modestie de langage que ci-dessus. Cependant il ne laisse pas que d’en tirer cette grande leçon, qu’il ne faut pas s’affliger de la mort. « J’ai toujours », dit-il, « le Seigneur en ma présence ; et il est à ma droite, afin que je ne sois pas ébranlé. C’est pourquoi vous ne laisserez point mon âme dans l’enfer ». (Ps. 15,8)
Pierre voulant alors développer cette prophétie, commence ainsi : « Mes frères ». C’est toujours ainsi qu’il s’exprime lorsqu’il veut annoncer quelques grandes vérités ; et ce début est bien propre à rendre ses auditeurs attentifs et bienveillants. « Mes frères, qu’il soit permis de vous dire hardiment du patriarche David ». Quelle humilité ! et comme il parle modestement, dès qu’il peut le faire sans danger ! Il n’affirme donc pas que la prophétie concerne Jésus-Christ à l’exclusion de David ; et il agit en cela très prudemment, afin qu’en honorant à leurs yeux cet illustre prophète, il les amène à mieux respecter son autorité. Bien plus, en s’excusant comme d’un trait de hardiesse, de rapporter un fait public, il les loue et les flatte habilement Aussi ne dit-il pas simplement David, mais le patriarche David. « Qu’il soit donc permis de dire hardiment du patriarche David qu’il est mort et enseveli ». Il n’ajoute point qu’il n’est pas ressuscité, mais il le fait assez entendre par ces mots : « Et son sépulcre est parmi nous jusqu’à ce jour ». Cette citation suffit à son dessein, et, au lien d’en venir immédiatement à Jésus-Christ, il loue de nouveau le saint roi. « Or, comme il était prophète et qu’il savait que Dieu lui avait promis avec serment ».
2. Pierre s’exprime ainsi afin que du moins ; par honneur pour David et pour ses descendants, les Juifs accueillissent le dogme de la résurrection. Car si Jésus-Christ n’était réellement ressuscité, la prophétie ne serait pas accomplie, et eux-mêmes auraient à en rougir. « Et comme il savait que Dieu lui avait promis avec serment ». Ce n’était pas une simple promesse, mais un serment solennel. « Dieu lui avait donc promis avec serment que, selon la chair, le Christ sortirait de sa race, et qu’il serait assis sur son trône ». Admirez quels profonds mystères l’apôtre laisse soupçonner ! et comme il cite avec assurance les paroles du prophète, dès qu’il a su s’insinuer dans l’esprit de ses auditeurs. Aussi proclame-t-il ouvertement la résurrection de Jésus-Christ. « C’est pourquoi son âme n’a point été laissée dans le tombeau, et sa chair n’a point vu la corruption ». Ce langage a droit de nous étonner. Et, en effet, il affirme que la résurrection de Jésus-Christ n’est point semblable à celle des autres hommes, et que la mort, qui l’a tenu quelques instants, n’a pu étendre sur lui son empire souverain. Quant au péché des Juifs, Pierre l’a laissé entrevoir comme dans l’ombre, et sans parler du châtiment que ce péché méritait, il s’est borné à déclarer que les Juifs avaient mis à mort le Christ : puis il a exposé les preuves de sa divinité. Mais dès qu’il est démontré que celui qui a été mis à mort, est le Juste par excellence, et l’ami de Dieu, vous avez beau taire le châtiment de ce crime, les coupables se condamneront eux-mêmes plus sévèrement que vous ne pourriez le faire. C’est pourquoi, afin de mieux se concilier leur attention, il s’en réfère aux décrets du Père éternel, et tire cette conclusion de la prophétie, qu’ « il était impossible » que le Christ restât dans le tombeau.
Mais revenons sur l’explication des premiers versets. « Jésus de Nazareth que Dieu a rendu célèbre parmi vous ». Ainsi, le doute n’est plus permis à son égard parce qu’il s’est fait connaître par ses œuvres. Aussi, Nicodème disait-il à Jésus-Christ : « Personne ne peut faire « les miracles que vous faites ». (Jn. 3,2) Pierre dit également : « Dieu l’a rendu célèbre par les merveilles, les prodiges et les miracles qu’il a opérés par lui au milieu de vous ». Ce n’est donc point secrètement, puisqu’il a agi devant tout le peuple. C’est ainsi que l’apôtre conduit insensiblement ses auditeurs, des faits qu’ils connaissent à ceux qu’ils ignorent ; et quand il dit que tout cela s’est fait « par suite des décrets divins », il semble dire que de leur part ce crime a été involontaire, puisqu’il avait été prévu et réglé dans la sagesse et les conseils du Seigneur. Il passe donc rapidement sur tout ce qui eût pu les contrister, et dirige tous ses efforts à leur prouver que le Christ a été mis à mort. C’était dire à ses auditeurs : Quand vous le nieriez, ceux-ci, à savoir, les apôtres, l’attesteraient. Or, celui qui triomphe de la mort ne pourra-t-il pas plus aisément encore se venger de ses bourreaux ? Certainement. Mais Pierre évite de le dire ; et, sans leur annoncer que le Christ