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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/16

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exterminera la nation déicide, il se borne à le leur faire comprendre.
Nous apprenons également du discours de l’apôtre quelle est la signification de ce mot « être retenu ». Car celui qui retient une chose avec souffrance, cherche moins à en conserver la possession qu’à s’en décharger et à soulager ainsi sa douleur. C’est aussi avec une admirable justesse que saint Pierre dit : « David parlant au nom du Christ », de peur qu’on ne crût qu’il parlait en son nom. Voyez-vous maintenant avec quelle hardiesse il interprète la prophétie et en expose clairement le sens, en montrant le Christ assis sur son trône ? Or, le royaume du Christ est un royaume spirituel qui n’existe qu’au ciel. C’est pourquoi le fait de la résurrection implique celui de la possession de ce royaume ; et le prophète ne pouvait pas ne point en parler, puisque la prophétie concernait le Christ. Mais pourquoi le Psalmiste parle-t-il « de la résurrection du Christ », plutôt que de son royaume ? C’est pour nous révéler un grand mystère. Et pourquoi dit-il qu’il est assis sur son trône ? Parce que du haut des cieux il étend son autorité sur tous les Juifs et principalement sur ceux qui l’ont crucifié.
« Et sa chair n’a point vu la corruption ». Cette parole n’exprime pas moins fortement le dogme de la résurrection que celle-ci : « Dieu a ressuscité ce Jésus ». Et voyez-vous comme maintenant il le désigne par son nom ? « Et nous en sommes tous témoins. Après donc qu’il a été élevé, de la main de Dieu » ; Pierre en revient encore à Dieu le Père, quoique déjà il ait suffisamment, montré son action, parce qu’il sait combien cet argument est puissant. Il laisse également comprendre, sans le dire ouvertement, que ce même Jésus est monté au ciel, et qu’il y réside. « Et après qu’il a reçu la promesse du Saint-Esprit ». Observez ici que l’apôtre attribue l’envoi de cet Esprit divin au Père, et non au Christ. Mais, après avoir rappelé les miracles de celui-ci, l’attentat des Juifs contre sa personne, et le prodige de sa résurrection, il s’enhardit à en parler librement, et leur cite la déclaration de témoins qui ont tout vu et tout entendu. Cependant, s’il revient fréquemment sur la résurrection de Jésus-Christ, il ne parle qu’une seule fois du crime de ceux qui l’ont crucifié, pour éviter de leur être importun. « Après donc qu’il a reçu la promesse du Saint-Esprit ». Quel sublime mystère recèlent ces paroles ! Et je pense qu’ici saint Pierre fait allusion à la promesse que Jésus-Christ fit à ses apôtres avant sa passion. Aussi remarquez comme en ceci il lui attribue l’action principale, et comme il obtient adroitement un immense résultat. Car si Jésus-Christ a répandu l’Esprit-Saint, c’est de lui que parlait le prophète, quand il disait : « Dans les derniers jours je répandrai de mon Esprit sur vos serviteurs et sur vos servantes, et je ferai paraître des prodiges dans le ciel ».
Quelle doctrine se cachait donc sous ces paroles ? Mais à cause même de sa sublimité, l’apôtre la voile aux regards de ses auditeurs, et attribue au Père l’envoi du Saint-Esprit ; c’est pourquoi il se borne à énumérer les biens que nous a procurés l’incarnation du Fils, les miracles que celui-ci a opérés, la royauté qu’il a fondée, le peuple au milieu duquel il a paru, et il ajoute comme incidemment que lui aussi donne l’Esprit-Saint. Toute parole qui ne tend pas à l’utilité de ceux qui l’écoutent, est une parole vaine et inutile. C’est ce que témoigne le saint précurseur quand il dit : « Le Christ vous baptisera lui-même en l’Esprit-Saint ». (Mt. 3,11) Pierre montre également que Jésus-Christ, bien loin d’affaiblir la vertu de sa croix, l’a rendue plus brillante, puisqu’il accomplit en ce jour, à l’égard de ses disciples, la promesse qu’il avait précédemment reçue de son Père. C’était donc, dit l’apôtre, cette promesse qu’il nous avait faite, et qu’il se réservait d’accomplir dans toute son étendue, après le mystère de sa passion. « Je répandrai » ; cette expression marque la dignité du bienfaiteur, et l’abondance de ses dons. La suite de ce discours en est une preuve sensible, car c’est après avoir reçu l’Esprit-Saint, que Pierre annonce hardiment l’ascension de Jésus-Christ, et que, pour la prouver, il allègue, à l’exemple du Sauveur, le témoignage du Psalmiste. « Car David », dit-il, « n’est point monté au ciel ».
3. Ici la parole de l’apôtre se relève noblement, et il parle avec fermeté. Il n’a donc plus recours à ces précautions oratoires : qu’il me soit permis de vous dire ; mais il s’exprime en toute franchise. « Le Seigneur a dit à mon Seigneur : assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que je réduise tes ennemis à te servir de marche-pied ». Or, si le Christ est le Seigneur de David, à plus forte raison l’est-il des