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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/93

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ajoutera autre chose, et ainsi tout vous sera attribué. Voua aurez peu donné et vous recevrez la récompense du tout. Commencez, jetez les fondements : bien plus, excitez-vous les uns les autres ; piquez-vous d’émulation. Maintenant, s’il s’agit de construire des magasins pour y déposer de la paille, du blé ou toute autre chose de ce genre, on s’y prête facilement ; mais, quand il s’agit de récolter des âmes, on ne s’en inquiète pas ; et les fidèles sont obligés de faire de longues routes, d’entreprendre de longs voyages pour trouver une église.
Et quel avantage pourtant qu’au milieu d’un repos parfait un prêtre vienne dans une église, s’approche de Dieu, et prie chaque jour pour la maison, pour le domaine ! Est-ce peu de chose, dites-moi, que votre nom soit prononcé dans les saintes oblations, que chaque jour des prières montent vers Dieu en faveur de la localité ? Quel profit pour vous et pour, les autres ! Peut-être y a-t-il des propriétaires voisins qui ont des intendants ; vous êtes pauvre et aucun d’eux ne daigne venir chez vous ; mais ils pourront inviter le prêtre et le faire asseoir à leur table. Voyez-vous que de biens en résulteront ? en attendant, votre demeure sera exempte de tout soupçon ; on n’y accusera personne d’homicide, de vol ; on n’y soupçonnera rien de semblable. Autre consolation encore, en cas de maladie ou de mort. L’amitié qui unira les membres de ces assemblées ne sera pas de circonstance et de hasard ; ces assemblées elles-mêmes seront beaucoup plus agréables que celles qui ont lieu dans les solennités publiques, non seulement les réunions, mais ceux qui y président deviendront plus respectables à cause du prêtre. Vous entendez tout le monde dire que dans l’antiquité Jérusalem était plus honorée que toutes les autres villes, et non sans cause : la piété y régnait alors. En effet, partout où Dieu est honoré, il n’y a rien de mauvais ; comme, au contraire, partout où il n’est pas honoré, il n’y a rien de bon. Ce sera une grande sécurité devant Dieu et devant les hommes. Je vous en prie donc : mettez la main à l’œuvre, non avec lenteur, mais avec zèle. Si celui qui sépare une chose précieuse d’une chose vile est comme la bouche de Dieu (Jer. 15,19), quelle ne sera pas la bonté divine à l’égard de celui qui rend service à tant d’âmes, qui les sauve même et dans le temps présent et dans les temps à venir, jusqu’à l’avènement du Christ ?
Formez un rempart contre le démon, et ce rempart c’est une église. Que de là sortent les mains qui doivent travailler, mais qu’avant d’aller au travail elles s’élèvent pour la prière. Ainsi le corps se fortifiera, l’agriculture sera féconde et on se délivrera de tous les maux. Il n’est pas possible d’expliquer un tel bonheur, à moins de l’avoir éprouvé. Ne dites pas que cela ne donne aucun revenu. Quelque décidé que vous soyez, ne mettez pas la main à l’œuvre si vous n’êtes pas convaincu que le profit en vaut mieux pour vous que toute la propriété ; n’entreprenez rien, si ce ne sont point là vos dispositions, si vous ne regardez cette tâche comme préférable à toutes les autres. Quel profit plus grand, que d’introduire des âmes dans l’aire céleste ? Hélas ! vous ne savez donc pas ce que c’est que de gagner des âmes ! Écoutez ce que le Christ dit à Pierre : « Si tu m’aimes, pais mes brebis ». (Jn. 21,15) Si vous voyiez les brebis ou les chevaux du roi exposés aux embûches faute d’étable, que vous leur en construisissiez une et leur donnassiez un berger, quelle récompense te roi ne vous accorderait-il pas ? Et maintenant que vous recueillez le troupeau du Christ et que vous lui donnez un berger, vous ne croiriez pas faire quelque chose de grand ? Que dis-je ? Si celui qui scandalise un seul homme, est menacé d’un si grand supplice, celui qui en sauve un si grand nombre ne sera-t-il pas sauvé ? Cela est de toute évidence. Quelque péché qu’il ait commis ou doive commettre dans la suite, ne l’efface-t-il pas ? Mesurez, sur le supplice de celui qui scandalise, la récompense de celui qui sauve. Si Dieu n’attachait pas tant d’importance au salut d’une seule âme, il ne s’irriterait pas autant de sa perte. Convaincus de ces vérités, attachons-nous à cette œuvre spirituelle ; que chacun m’appelle, et nous nous y appliquerons ensemble dans la mesure du possible. S’il y a trois propriétaires, qu’ils s’entendent entre eux ; s’il n’y en a qu’un, les voisins se laisseront gagner par son exemple. Tendez à ce but unique, je vous en prie, afin que, agréables à Dieu en toutes choses, nous obtenions les biens éternels, par la grâce et la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, en qui appartiennent au Père, en union avec l’Esprit-Saint, la gloire, la force, l’honneur, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.