Page:Jorga - Histoire des roumains et de leur civilisation, 1920.djvu/169

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des mémoires à l’usage du prince et des boïars, des lettres privées, et même pour des gloses en marge des chartes de propriété, qui devaient être rédigées dans ce slavon qui correspondait en Orient au latin des Occidentaux. Nous avons trouvé des manuscrits religieux du XVIe siècle, des premières années même de ce siècle, dans lesquels le texte roumain en lettres suit le texte slavon à l’encre, l’un étant pour la lecture et l’autre pour l’office.

Quand le diacre Coresi se mit à publier, outre son Evangille de 1561, des ouvrages religieux en roumain, ou en roumain et slavon, d’après les anciens textes qu’il modernisait ça et là légèrement et gauchement, il n’obéissait pas seulement au désir de donner en langue vulgaire l’Ecriture et ses commentaires — à l’imitation des Saxons qui avaient publié dès 1541 un cathéchisme roumain de propagande à Sibiu-Hermannstadt, — ni de fournir de livres liturgiques la nouvelle église calvine qui s’était formée en Transylvanie dès 1560, sous la protection impérieuse de l’État[1] ; il obéissait aussi à un besoin général de lecture qui avait saisi la société roumaine entière et que le slavon, généralement inconnu même aux prêtres, ne pouvait pas satisfaire. On en a la preuve dans ces versions, restées en manuscrit, des Miracles de sainte Parascève, de certaines Vies de Saints, surtout, à ce qu’il paraît, des saints guerriers, et de la légende d’Alexandre-le-Grand, qui fut traduite en roumain, par plusieurs clercs en même temps, d’après un texte serbe, avant 1600.

Or, si, à l’époque d’Etienne-le-Grand, la Bible pouvait inspirer l’esprit d’humilité qu’elle attribuait au roi David, si les chronographes impériaux amenaient

  1. Voy. notre « Histoire des Roumains de Transylvanie et de Hongrie », I, p. 196 et suiv.