Page:Jorga - Histoire des roumains et de leur civilisation, 1920.djvu/57

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barbare, habitué à guerroyer contre les Petschénègues, (qui devaient le tuer au retour, accourat avec ses compagnons d’armes et, après avoir vaincu l’ennemi désigné à ses coups, il s’avisa de prendre la place de ces mêmes Bulgares. Preslav devint pour quelques années la nouvelle capitale d’une « Russie » qui s’étendait, comme la Scythie ancienne, dont elle paraissait vouloir renouveler l’histoire, du Dnieper jusqu’au rivage occidental de la Mer Noire. Pour la Rome orientale, celle substitution était évidemment intolérable. Les troupes du nouvel empereur byzantin, l’Arménien Jean Tzimiskès, se dirigèrent « antre Sviatoslav, qui se renferma dans Silistrie, l’ancien Durostorum, pour y résister pendant quelques mois, jusqu’à ce que la famine l’eût contraint à abandonner définitivement le lieu de ses anciennes victoires.

Sur le champ de bataille, Tzimiskès fit bâtir la cité de Théodoropolis. Il avait rétabli l’ancienne frontière du Danube, et la Scythie Mineure entière fut sans doute rattachée à l’Empire. Les Roumains de la rive gauche furent soumis à l’autorité du patriarche de Trnovo, établi pour quelque temps à Silistrie. Les Russes ne devaient plus revenir sur le Danube que presque mille ans plus tard, attirés par le même mirage et nourrissant le même rêve de gloire. Sviatos-lav avait rapporté cependant de son aventure légendaire une conception supérieure de la vie politique, le titre de boïars pour les descendants des anciens Varègues normands et des cnèzes slaves, leurs camarades, et le souvenir, célébré pendant des siècles par la chanson populaire, du grand fleuve, aux ondes tour à tour dorées par le soleil du Midi et figées par le vent du Nord, qui est le Danube, « père des eaux ». Les princes de Galicie y trouvèrent, au XIe et au XIIe siècles, un encouragement pour essayer de renouer les relations brusquement interrompues par Je siège de Silistrie.