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ESTERHAZY


son passage au service des Renseignements tunisiens[1], où il échappait à la surveillance de ses chefs de corps, Esterhazy avait transcrit sur ses états de service, comme une citation à l’ordre de l’armée, la version mensongère, de pure invention, dont il était l’auteur[2].

Ce faux, qu’il exhibait au bon moment, fit quelques dupes.

Il continua, d’ailleurs, ses filouteries habituelles, achetant, à crédit, pour revendre. Il bafouait ses créanciers et, jouant au marquis, traitait leurs réclamations d’insolences[3]. L’un de ces faquins, l’ayant

    reusement ; les officiers et la troupe ont rivalisé d’entrain et de vigueur. Je suis heureux de pouvoir citer particulièrement le commandant Brouillet, le capitaine adjudant-major Pasquin et le capitaine Esterhazy qui, avec sa ligne de tirailleurs, s’est précipité dans le bois, en enlevant ses hommes avec un entrain et un élan remarquables. » Ordre du 1er septembre 1881, n° 82. (Voir Procès Zola, II, 213 ; Cass., I, 607, Esterhazy.)

  1. Il semble y être entré sur la recommandation du général (alors colonel) de Pellieux. (Notes d’un ancien officier du 135e.) Il y fit la connaissance de Sandherr. (Dép. à Londres, 1er mars 1900.)
  2. Cass., I, 616, général Guerrier : « Au moment de l’inspection générale de 1896, j’ai été frappé par une inscription, sur ses états de services, d’une citation à l’ordre de l’armée. En voyant la date du fait auquel cette citation se rapportait, j’ai été certain que cette inscription ne pouvait être justifiée par la raison péremptoire que cette affaire, qui avait été malheureuse, n’avait donné lieu à aucune citation pour personne. » L’ordre du colonel Corréard, qui ne nommait d’ailleurs pas Esterhazy, n’était qu’un ordre de régiment ; les ordres du jour de l’armée figurent seuls, sur les états de service, à un feuillet spécial. Guerrier rendit compte au commandant du 3e corps, et le ministre (Billot) ; ordonna la radiation de la fausse citation (Procès Zola, I, 314, Picquart) ; elle n’en figura pas moins, au pluriel, sur les notes qui furent communiquées au conseil de guerre de 1898 : « Très beaux services de guerre, citations, etc. » (Procès Esterhazy, 138.)
  3. Sur son agenda de 1885, à la date du 18 mai : « Lettre au carrossier Gibert pour réclamation insolente. ». J’ai sous les yeux cet agenda, qui fait partie de la collection d’autographes d’Auguste Molinier.