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LA COLLUSION


qu’ils ne donnèrent nul ordre, laissèrent faire, surent et approuvèrent.

Desvernine fit son rapport à Gonse : comme quoi il avait suivi Esterhazy à l’ambassade d’Allemagne[1]. Ni Gonse ni Boisdeffre n’en référèrent à Billot. Imaginez Dreyfus ayant dîné, une seule fois, par hasard, avec Schwarzkoppen !

Pourtant, on fit sermonner l’imprudent. Henry lui dit « qu’un ami de Dreyfus aurait pu le voir entrer chez Schwarzkoppen » ; Du Paty, « que c’était très crâne, mais qu’il ne fallait pas recommencer[2] ».

VIII

Le jour même où il reçut la visite d’Esterhazy, Schwarzkoppen se confessa au comte de Munster. C’était la première fois qu’il lui parlait d’Esterhazy ; jusqu’alors, il s’était borné à protester qu’il n’avait jamais connu Dreyfus[3]. En même temps, il adressa un rapport détaillé au général de Schlieffen, à Berlin. Il rapporta également l’incident à Panizzardi, et, cette fois,

    « Est-ce sur votre initiative que vous l’avez aidé ? — Je ne veux pas le dire devant lui. » (II, 191, 192.) « Je n’ai pas reçu d’ordre, mais j’ai cru comprendre qu’il fallait y aller. » (Instr. Tavernier, 7 juin, etc.) — Gonse et Boisdeffre se taisent sur les rapports d’Henry et d’Esterhazy. Du Paty en fait la remarque (Cass., II, 34).

  1. Roget (Rennes, I, 325) trouve la démarche « singulière » et « ne sait à quel mobile obéissait Esterhazy ». — Dans sa déposition à Londres (5 mars), Esterhazy mentionne le rapport de Desvernine.
  2. Esterhazy, Dép. à Londres ; Cass., II, 192, Du Paty.
  3. Renseignements inédits.