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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


ajourné de mois en mois, menace de mettre opposition sur ses appointements ; il écrit à l’avoué :

Il y a, en France, une catégorie de drôles qui s’imaginent que les galons d’un soldat et les croix gagnées sous les balles et au prix du sang versé, comme c’est mon cas, doivent servir à toutes les malpropres tentatives de chantage qu’il leur plaît d’inventer. Ces canailles auraient besoin du bois de lance d’un hulan prussien pour savoir comment on traite des soldats[1].

IX

Au mois de mai 1892, il entra en rapports avec Drumont[2], qui venait de fonder la Libre Parole et de l’inaugurer par une campagne contre « les officiers juifs dans l’armée[3] ».

Il y a des dessous, encore mal connus, au rôle d’Esterhazy dans cette affaire[4].

Les articles de la Libre Parole[5] étaient signés d’un comte Pradel de Lamase, déjà condamné deux fois pour diffamation[6]. Les officiers juifs y étaient

  1. Lettre saisie chez Lortat-Jacob, avoué, en réponse à une lettre recommandée du 20 août 1891, dont la copie est au dossier de la Cour de cassation. — Esterhazy déclare (naturellement) « qu’il n’a jamais refusé de payer les termes échus ».
  2. Cass., I, 712, Grenier.
  3. Voir t. I, 217.
  4. Cass., I, 714, Grenier : « Malgré les maux qu’il a causés à la famille Crémieu-Foa, par une intervention au moins maladroite, sinon louche, maintenant encore ceux-mêmes qu’il a le plus atteints lui gardent un arrière-fond de regrets. »
  5. Des 23 et 24 mai 1892. Il y en eut deux autres, le 26 et le 28.
  6. Acte d’accusation du marquis de Morès. (Loi du 30 août 1892, Droit, Gazette des Tribunaux, etc.)