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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


qu’il avait reçues, sauf une seule ; une femme la lui avait volée et ne la voulait restituer que dans un lieu écarté, la nuit, contre argent comptant. Il convoqua, en conséquence, divers membres de la famille de Comminges sur les bords de la Seine, à l’endroit où fut jeté plus tard le pont Alexandre ; c’était le soir du Vendredi Saint. Une femme voilée y vint[1]. Du Paty l’aborda et, après quelques instants d’entretien, il rapporta une enveloppe où se trouvait la lettre[2].

    connaître à la famille de Comminges l’existence de lettres compromettantes écrites à Du Paty. C’est cette trahison de Picquart qui avait motivé la rupture entre lui et Du Paty. » — Du Paty déclare qu’il n’existait aucune inimitié entre Picquart et lui (Cass., I, 456 ; II, 32). Leurs rapports, en effet, furent toujours corrects, mais Picquart n’estimait pas Du Paty.

  1. « Abritée sous un parapluie. » (Procès Zola, I, 103, Leblois.) — Du Paty lui aurait remis cinq cents francs.
  2. Procès Zola, I, 103, Leblois ; Cass., I, 346, Cuignet, — Cette histoire fait l’objet d’un dossier à la préfecture de police, dossier qui était connu d’Henry, dont il fut question au procès Zola (I, 63), et qui fut versé plus tard à la Cour de cassation. — Du Paty, à l’Instruction Tavernier (15 juillet 1899), proteste faiblement ; il convient de la scène finale, mais en rejette la responsabilité sur les Comminges : « Pendant l’hiver de 1891 à 1892, j’ai été attiré dans une famille où se trouvait une jeune fille en âge d’être mariée ; des pourparlers furent engagés entre moi et une sœur mariée de cette jeune personne, en vue d’un mariage ; j’ai cette correspondance. Mais la famille, dont la situation de fortune était modeste et dans tous les cas fort inférieure à la mienne, avait des vues différentes et songeait à un parti beaucoup plus avantageux sous le point de vue matériel. Les pourparlers n’aboutirent donc pas ; la jeune personne fit quelques difficultés pour accepter la décision de ses parents ; et quelqu’un de son entourage, pour modifier ses sentiments, imagina un procédé romanesque au cours duquel eurent lieu des manœuvres à mon égard, précisément inverses de celles exposées par le commandant Cuignet. » — Du Paty, ajoute qu’il a conservé des « pièces probantes ». Le rapport de la Préfecture fut « obtenu » pour parer à la divulgation de ces lettres. — Enfin le général Davout, duc d’Auerstædt, grand chancelier de la Légion d’honneur, « voulut bien apporter son concours pour