Page:Joubert - Pensées 1850 t1.djvu/424

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des esprits décidés et des opinions flottantes ; l’assertion au milieu du doute ; la confiance en soi-même et la défiance d’autrui ; la science des folles doctrines et l’ignorance des opinions des sages : tels sont les maux du siècle.

Pourquoi sommes-nous tous si sensibles à l’impression des choses agréables ou pénibles ? Nos pères l’étaient moins. C’est que notre esprit est plus vide, et notre faiblesse plus grande. Nous sommes plus désoccupés de sentiments sérieux ou de solides pensées. L’homme qui n’a que son devoir en vue et qui y court, prend moins garde à ce qui est sur son chemin.

Les esprits propres à gouverner, non-seulement les grands états, mais même leur propre maison, ne se rencontrent presque plus. Aucun temps ne les vit si rares.

Il n’y a plus aujourd’hui d’inimitiés irréconciliables, parce qu’il n’y a plus de sentiments désintéressés : c’est un bien né d’un mal.