Page:Joubert - Pensées 1850 t2.djvu/39

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Quiconque n’a jamais été pieux ne deviendra jamais poëte. L’exemple de Voltaire même ne dément pas cette assertion. Il fut enfant, et ce qui prouve qu’il avait été dominé par les impressions religieuses, c’est qu’il passa sa vie à les rappeler, à les décrier et à les combattre.

Même quand le poëte parle d’objets qu’il veut rendre odieux, il faut que son style soit calme, que ses termes soient modérés, et qu’il épargne l’ennemi, conservant cette dignité qui vient de la paix d’une âme supérieure à toutes choses. Qu’il se souvienne de ce beau mot de Lucain : pacem summa tenent… voulez-vous connaître le mécanisme de la pensée, et ses effets ? Lisez les poëtes.

Voulez-vous connaître la morale, la politique ? Lisez les poëtes. Ce qui vous plaît chez eux, approfondissez-le : c’est le vrai. Ils doivent être la grande étude du philosophe qui veut connaître l’homme.