Page:Journal des économistes, 1849, T23.djvu/234

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
226
JOURNAL DES ÉCONOMISTES.

riche que tel autre village où la nature a réparti la production d’une manière plus heureuse et l’a placée partout à côté des besoins et en rapport avec eux. Ainsi, non-seulement il ne faut pas créer des moyens de transport là où il n’y a pas production, mais, où il y a production, il faut encore étudier les besoins de la localité et voir si par hasard le consommateur ne se trouve pas à côté de la production. Cette étude ne suffit même pas encore. Il ne faut pas croire en effet que les moyens de transport à créer soient indifférents, et qu’il faille toujours préférer ceux qui sont les plus économiques. Ici nous croyons devoir signaler une erreur grave qui a aussi servi de base à l’établissement de plusieurs canaux. On s’est attendu que la plupart des marchandises qui fréquentent les routes sur les voitures du roulage prendraient les voies des canaux lorsqu’ils seraient exécutés. D’après une citation que nous avons faite, on a vu que le désespoir de restaurer les routes était entré pour beaucoup dans la pensée de doter la France d’un nouveau moyen de transport, et chaque jour on entend dire : Quand donc les canaux débarrasseront-ils les routes de ce gros roulage qui les ruine, qui les défonce ? Eh bien ! nous sommes convaincu que les routes n’ont rien à espérer sous ce rapport de l’achèvement des canaux. Certes nous ne prétendons pas dire que telle route qui longe précisément tel canal n’éprouvera pas quelque allégement dans son tonnage, mais ce sera à peine une compensation de l’excès de chargement que recevront les routes perpendiculaires qui serviront d’affluent ou de débouché aux marchandises du canal ; de sorte qu’après avoir dit : la France n’est pas assez riche pour dépenser une centaine de millions à la restauration de ses routes, donc elle ferait bien d’en dépenser 4 à 5 cents à établir des canaux, il arrivera que, ces canaux une fois faits, on se trouvera obligé de restaurer les routes comme si de rien n’était, et de consacrer des sommes plus considérables à leur entretien. Car il ne faut pas croire que le bon marché du transport soit la seule condition recherchée par le commerce, et que, dès qu’une voie plus économique est ouverte parallèlement à une route, elle va lui enlever toutes ses marchandises. Il suffit d’examiner ce qui se passe sur les routes pour reconnaître qu’il n’en peut être ainsi. On y voit, en effet, en concurrence quatre espèces de roulage à des prix trèsdifférents. Celui qui se fait sur l’impériale des diligences, qui coûte par tonne et par kilomètre au moins . . . . . . . . . . . . . O fr. 90 c. Celui qui se fait par le roulage accéléré, qui coûte. 0 40 Celui qui se fait par le roulage ordinaire, qui coûte 0. 20 Enfin, les transports de l’agriculture, dont le prix est bien inférieur encore. Il est évident d’abord que le canal n’enlèvera à la route ni les mar-