Page:Journal des économistes, 1874, SER3, T34, A9.djvu/419

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pense, au surplus, que la conclusion de mon mémoire est, à cet égard, suffisamment décisive.

Mes premiers efforts en ce sens datent de 1860. La nécessité de me livrer à des occupations pratiques me força de les interrompre pendant dix ans ; mais je ne cessai jamais de rapporter à ce point de vue toutes mes observations et toutes mes études économiques. Ayant obtenu, en 1870, la chaire d’économie politique à l’Académie de Lausanne, mon premier soin fut de reprendre mes recherches, et, malgré l’obligation où je fus alors de mettre en train plusieurs cours sur les diverses parties de l’économie politique et sociale, j’arrivai à un assez prompt résultat. Je fus, en effet, dès le milieu de 1871, en possession de la solution du problème de l’échange de deux marchandises et de celle du problème de l’échange de plusieurs marchandises entre elles, que j’introduisis dans mon enseignement pour l’année scolaire 1871-72. et que j’exposai dans des conférences publiques faites à Genève en janvier 1872. Dans le courant de cette même année 1872, j’achevai d’établir en détail la théorie mathématique de l’échange et celle de la production, et me mis à la rédaction de mon traité élémentaire d’économie politique pure. En 1873, ayant trouvé un éditeur, je commençai l’impression de cet ouvrage et communiquai le principe de ma théorie à l’Académie des sciences morales et politiques. Si votre nom n’a pas été mentionné dans cette communication, c’est qu’au moment où je la fis, j’ignorais absolument que vous fussiez entré déjà dans la même voie ; mais je suis tout disposé à réparer cette omission involontaire.

Si l’on ne considérait l’état de la question qu’en France et en Angleterre, nous n’aurions guère à nous partager, Monsieur, d’après ce que vous me dites vous-même de l’accueil fait, dans votre pays, à vos idées, qu’une réputation de rêveurs assez chimériques ; et ce partage ne vaudrait peut-être pas la peine d’être effectué si soigneusement. Mais je suis heureux de pouvoir vous apprendre qu’il en est autrement ailleurs, notamment en Italie où la méthode nouvelle a été saisie dans son esprit et dans sa portée avec une intelligence et une promptitude merveilleuses, et où des hommes éminemment distingués, avec lesquels je ne saurais trop vous engager à vous mettre en rapports, MM. les professeurs Alberto Errera, de Padoue, Boccardo, de Gênes, Bodio, directeur général de la statistique du royaume, à Rome, Zanon, de Venise, lui ont donné leur assentiment. Dès lors, il importe essentiellement que l’opinion publique soit mise en mesure de vous attribuer, sur le point capital, dont vous me parlez, la priorité que vous réclamez et qui vous appartient incontestablement en vertu de l’antériorité de vos publications de 1866 et de 1871 sur les miennes. À cet effet, je vous propose de demander à M. Joseph Garnier, rédacteur en chef du Journal des Économistes, qui a bien voulu reproduire mon mémoire, de vouloir bien aussi insérer votre