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portraits

vatoire, son piano une lyre pour accompagner non des romances, mais la traduction lyrique de ses hauts concepts philosophiques ; c’est la femme qui sait, non pas d’après les manuels, mais se confronta avec les sciences biologiques et astronomiques ; quoi d’étonnant que cette jeune fille à la si suprême beauté soit savante comme un savant de vingt ans doué de génie, et que ses points de comparaison elle les établisse, non avec les autres petites filles, mais avec les nébuleuses qui se créent dans l’infini ? Salomé, ce serait peut-être la compagne duc au prince Hamlet, une union qui serait collaborative et pensante.

Elsa, la petite Elsa, n’est qu’une jeune fille de la foule, parée seulement de beauté. Sa science de la vie, précoce quoique sommaire, sa prescience plutôt, non documentée mais si bien aiguillée vers les routes des sens, déconcerte le jeune Lohengrin, échappé des bureaux de Mont Salvat, comme souvent les jeunes filles poussées en pleine serre chaude du monde étonnent le bachelier encore engourdi d’humanités. Et Ruth, du Miracle des Roses, joint Salomé et Elsa. Elle n’a pas les pensées de Salomé ni les curiosités, elle en a le calme et les obstinations, et la dernière figure, la plus douce, est celle de la Syrinx si fière d’elle, de son intangibilité, qu’elle préfère s’évanouir au miroir des eaux pour laisser entier le rêve de Pan, lui soustrayant la désillusion du tous les jours en le hantant de la musique de sa voix.

Et, autour de ces silhouettes de pensée pure, quel admirable décor tout d’invention, depuis la fête à l’Alcazar des Iles Ésotériques, avec ses clowns philoso-