Page:Kahn - Symbolistes et Décadents, 1902.djvu/294

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solide, avait été provoqué inconsciemment par Nerval, préférant n’être qu’un écrivain en prose, plutôt que de subir ces inutiles prescriptions de Procuste — exemple que suivra le grand poète Flaubert. Théodore de Banville néanmoins continue avec une expansion claire et ensoleillée et les plus beaux dons lyriques le jeu purement romantique.

Le Romantisme disloqué à sa base, et voyant pour la première fois s’éloigner de lui les plus doués, semble se chercher à nouveau ; l’évolution des chefs continue. Si Gautier demeure le même, toujours épanoui, savant, fier et imprévu, Hugo et Lamartine compliquent leur art par un plus large emploi de la vie sociale. Ils vont tous deux, avec des allures et succès différents, mais d’une même noble allure, vers les revendications populaires, vers la liberté. Hugo écrit certains chapitres des Misérables, qui ne paraîtront que plus tard, mais ses poésies et ses discours indiquent son mouvement. Lamartine se modifie, se transpose, se fortifie. Si le poète n’écrit plus de vers, l’historien des Girondins est un poète.

Ce fut une belle période, ce hit un beau Paris littéraire que celui qui contenait Hugo, Lamartine, Vigny, Musset, Gautier, Baudelaire, Leconte de Lisle, Balzac, Banville, près de Berlioz, de Delacroix, de Decamps, et qui s’honorait de la présence d’un auguste exilé, Henri Heine. Le romantisme français et le romantisme allemand sont rapprochés par la présence à Paris et les amitiés de ce grand poète. Heine, Nerval, Gautier furent réunis. Le romantisme français et celui d’Allemagne furent, à ce moment, frères en quelque idées