Page:Kahn - Symbolistes et Décadents, 1902.djvu/97

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Ce rêve sera modifié par ceci que le passant sera heureux ou malheureux, simplement de bonne ou de mauvaise humeur, affairé ou oisif ; et l’état complet de sa sensation ne sera constitué que lorsque, l’ayant quitté, il verra soit un fait de nature soit un phénomène humain qui, par un contraste, lui apprenne que la vision de tout à l’heure est finie. Alors, un instant, la perception est nette ; mais très rapidement le nouveau point du paysage ecite son attention, de nouvelles réactions entrent en jeu, la sensation redevient mixte et se continue ainsi jusqu’à ce qu’un fait d’ordre purement matériel interrompe le courant d’idées, l’ordre de succession des idées engendrées par la vue du paysage et enterre les perceptions latentes et qui allaient naître, sous un choc plus violent s’élevant dans l’individu.

Or, si un paysage est donc à toute minute modifiable en toutes les impressions qu’il suggère par ses conditions même d’existence, que plus complexe, plus modifiable encore est un phénomène humain, un phénomène psychique, dont nous ne pouvons guère percevoir le heurt que lorsqu’il s’est produit et va s’effaçant. Nous ne ressentons une impression mentale ou affective, qu’en vertu de l’existence antérieure d’une autre impression ; ces phénomènes sont variés par l’heure de la vie, la disposition initiale, l’atavisme, la santé générale de l’individu, sa santé momentanée, ses conditions de force, de normalité, le nombre des expériences acquises, l’essence de l’individu, plus toutes les mêmes conditions de variations chez l’être ou les êtres avec lequel il est en contraste.