Page:Kant-Mélanges de Logique (trad. Tissot), 1862.pdf/357

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se laisse du moins conduire à une forme légale, et par là à un état de repos.

Néanmoins, comme la raison humaine ne cesse jamais de soupirer après la liberté, il est nécessaire, si elle vient à briser ses liens, que son premier usage d’une liberté longtemps restée sans exercice dé­génère en abus, et qu’une confiance téméraire en l'indépendance de sa faculté à l’égard de toute restriction ne se change en une foi à la souveraineté exclusive de la raison spéculative, qui n’admettra rien que ce qui peut se justifier par des raisons objectives et une persuasion dogmatique, rejetant témérairement tout le reste. La maxime de l’indépendance de la raison à l’égard de son propre besoin (la renonciation à une foi rationnelle) s’appelle donc incrédulité ; non pas une incrédulité historique, qu’on ne peut absolument concevoir comme délibérée, ni par conséquent comme imputable (attendu que chacun, qu’il le veuille ou non, est forcé de croire à un fait suffisamment établi, tout comme à une démonstration mathématique), mais bien une incrédulité rationnelle, un état pé­nible de l’esprit humain, qui ôte aux lois morales d’abord toute la force du mobile sur le cœur, ei prépare la façon de penser qu’on appelle impiété, c’est-à-dire le principe de ne plus admettre aucun devoir. Ici intervient l’autorité, pour empêcher que la société ne tombe dans le plus grand désordre. Et