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CRITIQUE DU JUGEMENT TÉLÉOLOGIQUE

port, cette maxime du Jugement est encore utile, elle n’est pas indispensable, puisque la nature, dans son ensemble, ne nous est pas donnée comme organisée (dans ce sens étroit du mot que nous avons indiqué précédemment). Elle est, au contraire essentiellement nécessaire relativement aux productions organisées de la nature, car, pour arriver à connaître par l’expérience leur constitution intérieure, nous devons les juger comme ayant été formées uniquement d’après des fins, et nous ne pouvons même les concevoir comme choses organisées, sans y lier l’idée d’une production intentionnelle.

Or le concept d’une chose, dont nous nous représentons l’existence ou la forme comme possible sous la condition d’une fin, est inséparable du concept de la contingence de cette chose (relativement aux lois de la nature). C’est pourquoi les choses de la nature, que nous ne trouvons possibles que comme fins, forment la principale preuve de la contingence de l’univers et le seul argument qui conduise le sens commun et les philosophes à rattacher le monde à un être existant en dehors de lui et intelligent (à cause de cette finalité) ; et la téléologie ne trouve l’explication dernière de ses investigations que dans une théologie.

Mais que prouve en définitive la téléologie la plus parfaite ? Prouve-t-elle l’existence de cet être intelligent ? Non. Elle ne prouve rien de plus, sinon que,