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Page:Kant - Prolégomènes à toute métaphysique future, trad. Tissot, 1865.djvu/63

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POSSIBILITÉ D’UNE MATHÉMATIQUE PURE.


appelle premières, l’étendue, le lieu, et en général l’espace avec tout ce qui en dépend (impénétrabilité ou matérialité, forme, etc.), et que je mette tout cela au nombre des simples phénomènes, c’est à quoi on ne pourra trouver raisonnablement à redire. Et de même que celui qui ne regarde pas les couleurs comme des propriétés qui fassent partie de l’objet même, mais comme des modifications qui tiennent au sens de la vue, ne peut cependant point s’appeler idéaliste, de même ma doctrine ne peut être traitée d’idéalisme par le seul fait que je trouve qu’un plus grand nombre de propriétés des corps, que toutes les propriétés même qui constituent l’intuition d’un corps, n’appartiennent qu’à son phénomène ; car l’existence de la chose qui apparaît n’est point par là même supprimée, comme dans le véritable idéalisme ; mais par là on fait voir seulement qu’on ne peut absolument pas connaître par les sens la chose telle qu’elle est en soi.

Je voudrais bien savoir ce que devraient donc être mes assertions pour ne pas impliquer l’idéalisme. Je devrais dire sans doute que la représentation de l’espace n’est pas entièrement d’accord avec le rapport de notre sensibilité aux objets comme je l’ai dit mais qu’elle est absolument semblable à l’objet, assertion à laquelle je ne puis trouver de sens, aussi peu qu’il y a peu de ressemblance entre la sensation de rouge et la propriété du cinabre qui produit en moi cette sensation.