Page:Kipling - Au hasard de la vie, trad. Varlet, 1928.djvu/161

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En attendant le palanquin restait dans mon écurie, dont la clef était entre les mains de Mulvaney.

La paye arriva, et avec elle la bière. On ne pouvait humainement espérer que Mulvaney, desséché par quatre semaines d’aridité, serait capable d’éviter les excès. Le lendemain matin il avait disparu ainsi que le palanquin. Il avait pris le soin d’obtenir trois jours de permission « pour aller voir un ami sur le chemin de fer », et le colonel, sachant bien que la crise annuelle était proche, et dans l’espoir qu’elle épuiserait sa force au delà des limites de sa juridiction, lui accorda de bon cœur tout ce qu’il demandait.

C’est là que s’arrêtait l’histoire de Mulvaney, telle que je l’entendis dans la salle du mess.

Ortheris ne la mena pas beaucoup plus loin.

— Non, il n’était pas saoul, me dit loyalement le petit homme. La boisson ne faisait encore que commencer à s’infiltrer en lui ; mais avant de partir il s’en alla remplir de bouteilles tout ce sacré palanquin. Il est parti après avoir loué six hommes pour le porter, et je dus l’aider à entrer dans sa couche nuptiale, parce qu’il ne voulait plus entendre raison. Il est parti sans tunique, en chemise et pantalon, et jurant terriblement… parti sur la route dans le palanquin, et il agitait ses jambes par la fenêtre.

— Oui, fis-je, mais où est-il allé ?

— Voilà justement la question. Il m’a dit qu’il s’en allait vendre ce palanquin, mais d’après des remarques qui lui ont échappé au moment où je l’enfournai par la porte j’imagine qu’il est allé à la