Page:Klapka - Trois Hommes en Allemagne, traduction Seligmann, 1922.djvu/154

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Il se calma et continua :

— Il y en avait quatre à la devanture, vous vous le rappelez bien. Tous quatre semblables, et chacun marqué vingt marks en chiffres connus. Je n’ai pas la prétention de parler couramment l’allemand, mais avec un petit effort j’arrive généralement à me faire comprendre et à saisir le sens de ce que l’on me dit, pourvu qu’on ne mange pas les mots. J’entre donc dans ce magasin. Une jeune fille s’avance vers moi. Elle était jolie, elle avait l’air sage, timide même : on ne se serait pas attendu en la voyant à une telle chose. De ma vie je n’ai été aussi surpris.

— Surpris de quoi ? demandai-je.

George suppose toujours que vous connaissez la fin de l’histoire dont il raconte le commencement ; c’est un genre déplaisant.

— De ce qui arriva, expliqua-t-il, de ce que je vous raconte. Elle se prit à sourire et me demanda ce que je voulais. Je perçus cela parfaitement ; aucun doute ne pouvait surgir dans mon esprit. Je déposai une pièce de vingt marks sur le comptoir et dis :

— Donnez-moi, s’il vous plaît, un coussin.

Elle me regarda comme si je lui avait demandé un édredon. Je pensai que peut-être elle n’avait pas bien compris, de sorte que je lui répétai ma demande d’une voix plus forte. Si je l’avais caressée sous le menton, elle n’eût certes pu avoir un air plus surpris ni plus indigné.