Page:Kleist - Kotzebue - Lessing - Trois comedies allemandes.djvu/37

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Ève.

Ruprecht !

Ruprecht.

Laisse-moi, toi !

Ève.

Mon Ruprecht bien-aimé.

Ruprecht.

Fais que je ne te voie plus.

Ève.

Je t’en conjure !

Ruprecht.

Tu n’es qu’une misérable… je ne veux pas dire quoi !

Ève.

Laisse-moi te dire un seul mot, à part.

Ruprecht.

Non !

Ève.

Tu vas partir au régiment, Ruprecht. Qui sait, quand tu porteras fusil, si je te reverrai de ma vie ? Il y a la guerre, penses-y, la guerre pour laquelle tu partiras ; veux-tu me quitter avec une semblable rancune ?

Ruprecht.

De la rancune, non ! Dieu m’en préserve ! Qu’il t’accorde au contraire toutes les prospérités qu’il se peut. Mais quand bien même je reviendrais de la guerre sain et sauf, avec un corps robuste comme l’airain, et que je vivrais à Huisum jusqu’à quatre-vingts ans, je te dirai jusqu’à ma mort : Tu es une gourgandine ! Tu veux d’ailleurs toi-même en jurer devant le tribunal.

Dame Marthe, à Ève.

Viens ici ! Que te disais-je ? Veux-tu encore te faire injurier ? C’est monsieur le caporal qu’il te faut pour mari, une digne jambe de bois, qui, à l’armée, a fait marcher