Page:Krysinska - Intermèdes, 1903.djvu/32

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ses accents, ses silences, ses coupures, ses roulements, son mètre, sa vibration, son harmonie.

Il y a des lignes fausses, comme il y a des vers faux.

Elle est donc bien près d’être un admirable maître de la prose, Mme  Marie Krysinska, qui a érigé sur la platitude contemporaine le crucifix de cet étonnant calvaire, dédié au parfait rythmeur parnassien, Raoul Gineste, en de beaux rythmes dénoués comme une robe de sybille. »

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De la lande attristée, vers le ciel d’or glorieux,
Monte la vieille croix de pierre
Aux héroïques bras jamais lassés,
De leur geste large ouvert, et sur qui les averses
Ont mis l’offrande des mousses.

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Et dans l’ombre commençante,
La vieille croix agrandie
Semble unir au sol le zénith
Comme un pont jeté
Sur les éthéréennes ondes,
Comme un sublime et symbolique pont, menant,
De la lande attristée, vers le ciel d’or glorieux.


Ai-je dit que Mme  Marie Krysinska a tenté le vers libre il y a huit ans, lorsque nul des poètes d’aujourd’hui n’y songeait encore ? Elle a donc inventé presque un art et, tout de suite, elle a su revêtir sa trouvaille d’une grande beauté. Il faut lui en avoir beaucoup de gratitude. Car les poètes ne sont point des superfluités, ainsi que l’imaginent quelques hommes d’État et, de toutes les lois, de tous les