Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 1.djvu/115

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salon royal était le plus rempli de courtisans, il s’en vint et dit : "Sache, seigneur, que de la folie qui a poussé mon frère à mourir, ta fille seule est coupable, car il a eu l’âme traversée d’une douleur telle, pour l’avoir vue oublier toute pudeur, que, plus que la vie, la mort lui fut chère.

« 11 en était amoureux ; et comme ses intentions n’étaient point déshonnêtes, je ne veux pas le cacher. Il espérait, par son mérite, et grâce à ses fidèles services, l’obtenir de toi pour femme. Mais pendant que le malheureux en respirait respectueusement de loin le parfum, il a vu un autre monter sur l’arbre objet de son culte, et cueillir le fruit si ardemment désiré."

« Et il continua, disant comment il avait vu Ginevra venir sur le balcon, et comment elle jeta l’échelle par laquelle était monté jusqu’à elle un amant dont il ne savait pas le nom, et qui avait, pour ne pas être reconnu, changé ses vêtements et caché ses.cheveux. Il ajouta qu’il était résolu à prouver, par les armes, que tout ce qu’il avait dit était vrai.

« Tu peux penser si le père de Ginevra fut atterré de douleur, quand il entendit accuser sa fille. Il s’afflige non seulement d’avoir appris d’elle ce qu’il n’aurait jamais soupçonné, et ce qui l’étonne étrangement, mais aussi parce qu’il se voit dans la nécessité, si aucun guerrier ne prend sa défense et ne convainc Lurcanio de mensonge, de la condamner et de la faire mourir.