Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 1.djvu/23

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gens de France et d’Allemagne, le roi Charles tenait campagne.

Pour faire repentir encore le roi Marsille et le roi Agramant de la folle hardiesse qu’ils avaient eue, l’un de conduire d’Afrique autant de gens qui étaient en état de porter l’épée et la lance, l’autre d’avoir soulevé l’Espagne, dans l’intention de détruire le beau royaume de France. Ainsi Roland arriva fort à point ; mais il se repentit vite d’y être venu ;

Car peu après sa dame lui fut ravie. — Voilà comme le jugement humain se trompe si souvent ! — Celle que, des rivages d’Occident à ceux d’Orient, il avait défendue dans une si longue guerre, maintenant lui est enlevée au milieu de tous ses amis, sans qu’il puisse tirer l’épée, dans son propre pays. Le sage empereur, qui voulut éteindre un grave incendie, fut celui qui la lui enleva.

Peu de jours avant, était née une querelle entre le comte Roland et son cousin Renaud, tous les deux ayant pour cette rare beauté l’âme allumée d’amoureux désirs. Charles qui n’avait pas un tel conflit pour agréable, car il lui rendait leur concours moins entier, enleva cette donzelle qui en était la cause et la remit aux mains du duc de Bavière,

La promettant en récompense à celui des deux qui, dans cette bataille, en cette grande journée, aurait occis une plus grande masse d’infidèles, et de son bras lui aurait le plus prêté l’appui. Mais