Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 1.djvu/252

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s’il en employa plus, il ne dépassa pas ce nombre de beaucoup. Il eut bientôt débarrassé la plage autour de lui, et il se retournait déjà pour délier la dame, quand un nouveau tumulte et de nouveaux cris firent résonner une autre partie du rivage.

Pendant que le paladin avait retenu de ce côté les barbares insulaires, les Irlandais étaient descendus sans obstacle sur plusieurs points de l’île. Toute pitié étant éteinte en leur âme, ils avaient fait de tous côtés un effroyable carnage de toute la population. Soit justice, soit cruauté, ils n’épargnèrent ni le sexe, ni l’âge.

Les insulaires firent peu ou point de résistance, soit qu’ils eussent été assaillis trop à l’improviste, soit que l’île contînt peu d’habitants et qu’ils n’eussent été en aucune façon prévenus ; leurs biens furent saccagés ; on mit le feu aux habitations, et la population fut égorgée. Les remparts de la ville furent rasés au niveau du sol. Pas un être n’y fut laissé vivant.

Roland, sans se laisser troubler par cette grande rumeur, ces cris et ces ruines, s’en vint vers celle qui était attachée sur la pierre sombre pour être dévorée par l’orque marine. Il la regarde et il lui semble qu’il la reconnaît, et plus il s’approche, plus il croit reconnaître Olympie. C’était en effet Olympie qui avait reçu une si injuste récompense de sa fidélité.

Malheureuse Olympie ! après les chagrins que lui avait causés l’amour, la fortune cruelle lui