Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 1.djvu/322

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sous leurs coups, nous qu’on a coutume d’appeler tes amis, les païens diront que tu es sans pouvoir, puisque tu laisses périr tes serviteurs.

« Et pour un qui t’est aujourd’hui rebelle, il en naîtra cent par tout l’univers ; de sorte que les fausses doctrines de Babel chasseront ta loi et la feront disparaître. Défends ces nations ; ce sont elles qui ont délivré ton sépulcre des chiens immondes, et pris si souvent la défense de ta sainte Église et de ses vicaires.

« Je sais que nos mérites ne doivent pas peser une once en notre faveur, et que nous ne devons point espérer de pardon de toi, si nous considérons notre vie coupable ; mais, si tu nous favorises du don de la grâce, notre raison sera purifiée et réconfortée. Nous ne pouvons désespérer de ton aide, quand nous nous souvenons de ta pitié. »

Ainsi disait le pieux empereur, dans l’humilité et la contrition de son cœur. Il ajouta encore d’autres prières, d’autres vœux commandés par la grandeur du péril et en rapport avec son rang de souverain. Sa chaleureuse supplique ne resta point sans effet, car son bon génie, qui tient la première place parmi les anges, les prit, déploya ses ailes vers le ciel et s’en vint les porter au Sauveur.

Une infinité d’autres prières furent également portées à Dieu par de semblables messagers. Les âmes bienheureuses, la pitié peinte sur le visage, se tournèrent toutes vers leur éternel amant, et lui témoignèrent même désir de voir accueillir la