Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 1.djvu/325

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qu’il la retrouve dans ce nouvel enfer, au milieu des saints sacrifices et des messes ! Il paraît étrange à Michel de voir là celle qu’il ne comptait trouver qu’après un long voyage.

Il la reconnaît à ses vêtements de mille couleurs, formés de bandes inégales, multiples et toutes déchirées, qui, agitées par les vents, ou entr’ouvertes par sa marche, tantôt la couvrent et tantôt la montrent nue. Ses cheveux, noirs et gris, mêlés de filets d’or et d’argent, sont tout en désordre. Les uns sont réunis en tresse, les autres retenus par un galon. Une partie est éparse sur ses épaules, l’autre dénouée sur son sein.

Elle avait les mains et. la poitrine couvertes d’assignations, de libelles, d’enquêtes, de papiers de procédure, et d’un grand tas de gloses, de consultations et d’écrits, au moyen desquels les biens des pauvres gens ne sont jamais en sûreté dans les villes. Devant, derrière, à ses côtés, elle était entourée de notaires, de procureurs et d’avocats.

Michel l’appelle à lui et lui ordonne de se transporter parmi les plus braves des chevaliers sarrasins, et de faire en sorte de les exciter à combattre les uns contre les autres pour leur plus grande ruine. Puis il lui demande des nouvelles du Silence. Elle peut facilement en avoir, puisqu’elle va de çà, de là, secouant partout ses feux.

La Discorde lui répond : « Je ne me souviens pas de l’avoir vu nulle part. Je l’ai entendu nommer bien souvent, et faire son éloge par les