Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 1.djvu/63

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porte qui donnait entrée dans la seconde et beaucoup plus large caverne.

L’emplacement, carré et spacieux, semble une chapelle vénérable et consacrée, soutenue par des colonnes d’un albâtre rare et d’une belle architecture. Au milieu s’élevait un autel bien ordonné, devant lequel était une lampe allumée, dont la flamme brillante et claire rendait une vive lumière dans l’une et l’autre caverne.

Saisie d’une pieuse humilité, la dame, aussitôt qu’elle se voit dans un lieu saint et consacré, s’agenouille, et du cœur et de la bouche commence à adresser ses prières à Dieu. Pendant ce temps une petite porte, placée en face d’elle, s’ouvre et crie ; il en sort une femme sans ceinture, les pieds nus et les cheveux épars, qui salue la damoiselle par son nom,

Et dit : « O généreuse Bradamante, tu n’es pas venue ici sans un vouloir divin. Depuis plusieurs jours l’esprit prophétique de Merlin m’a prédit ta venue, et que tu devais, par un chemin inusité, venir visiter ses saintes reliques. Et je suis restée ici, afin de te révéler ce que de toi les cieux ont déjà statué.

« C’est ici l’antique et mémorable grotte qu’édifia Merlin, le savant magicien — dont peut-être tu as parfois entendu rappeler le souvenir — alors qu’il fut trompé par la Dame du Lac. C’est ici qu’est le sépulcre où gît sa chair corrompue ; c’est là que, pour satisfaire celle qui le lui demanda, il se coucha vivant et resta mort.