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joindre, ordonner. « Il donna sentence contre luy… et lui adjongnit qu’il prescha tout le contraire. » (Chron. St Denys, T. II, fol. 32, V°.)

Conjug.
Ajoignessent, partic. prés. Joignant, unissant. (St  Bern. Serm. fr. ms. p. 71.)
Ajunsis, prétér. Joignis, unis. (Id. ibid. p. 82.)
Ajunst. indic. prés. Joint, unit. (Id. ibid. p. 83.)
variantes :
ADJOINDRE. Monet, Dict.
Ajoindre. Fabl. MS. du R. no 7218, fol. 354, V° col. 2.
Ajointier. Ibid. fol. 61, R° col. 2.
Ajunnre. St  Bern. Serm. fr. MSS. p. 79.

Adjoint, partic. Joint, uni.

En latin conjunctus dans les Serm. de St  Bern. Le passage répond à celui-ci : « Eswarde [1]… ke tu à Deu es ajuns, et si ne soies mies non greit sachans. » (St Bern. Serm. fr. mss. ubi suprâ.)
Ce mot, sous la première orthographe, s’employoit pour conjonction, et l’on disoit adjoint que, pour joint que, outre que.

Prenez variés de bon lieu, touz apris.
Humbles de cuer et doctrine soullrens…
Adjoint encore qu’aient été nourris,
En paine avoir et non pas en delis.
Eust. des Ch. Poës. MSS. fol. 149, col. l.

variantes :
ADJOINT. Eust. des Ch. Poës. MSS. fol. 551, col. 4.
Ajoint. St  Bern. Serm. fr. MSS. p. 78, 135, 141, et passim.
Ajuns. Id. ibid p. 80.
Ajunt. Id. ibid. p. 382.
Ajunz. Id. ibid. p. 284.

Adjouda my, interjection. Aide-moi.

Dans le patois Limousin. (Voy. Rabelais, T. II. page 45.)

Adjour, subst. masc. Ajournement.

On disoit autrefois être à jour, pour être ajourné. (Voy. l’article Jour ci-après.) C’est de la réunion de ce mot avec la préposition ad ou à, devenue préposition inséparable, que s’est formé celui d’Adjour, le même qu’adjournement, suivant la note en marge du passage que nous allons citer : « Dans le Baillage de Haynault, les Sergens de ladite Court, des adjours qu’ils feront auront pour chacun adjourné cinq sols tournois en la ville où ils seront demourans, etc. » (Goût. gén. T. I. p. 793.)

variantes :
ADJOUR. Cout. gén. T. I, p. 793.
Ajour. Dits de Baudoin de Condé, MS. de Gaignat, fol. 320, R° col. 1.

Adjournée, subst. fém. Malin, point du jour. Journée.

Le premier sens est le sens propre de ce mot, formé d’Adjourner ci-après. (Voy. Adjournement.)

. . . . . . . vostre fille a espousée
Très hui matin à l’ajornée.[2]
Fabl. MS. du R. no 7218, fol. 355, R° col. 1.

Une femme ayant appris le soir que son mari devoit aller à un marché le lendemain de grand matin, le fit savoir à son amant, et lui manda :

Qu’il fust la nuit bien esveilliez.
Et prestement appareilliez
D’entrer, come bien avertis,
Laiens [3], quand il sera partis,
Ses sires, devant l’enjonrée.
Fabl. MS. de St  Germ. fol. 121, R° col. 1.

On disoit toute jour ajournée, pour signifier tout le jour, à commencer dès le matin.

Je n’ai, toute jour ajournée
Ne toute nuit, nul autre avis.
Froissart, Poës. MSS. p 103, col. 1.

Quelquefois le mot adjournée exprimoit seul la force de cette expression, comme dans ce vers :

Là demeuray mainte adjournée.
G. Machaut, MS. fol. 203, V° col. 3.

C’est-à-dire : « là j’ai passé souvent des journées entières. »

variantes :
ADJOURNÉE. G. Machaut, MS. fol. 203, V° col. 3.
Ajornée. Chans. fr. du treizième siècle, MS. de Bouh. fol. 181, V°. — Rom. de Berte as grans piés, MS. de Gaignat, fol. 136, V° col. 2.
Ajournée. Froissart, Poës. MSS. p. 103, col. 1. — Enfance d’Ogier le Danois, MS. de Gaignat, fol. 76, V° col. 2.
Engornée. Fabl. MS. de St  Germ. fol. 13, R° col. 2.
Enjornée. Fabl. MS de St  Germ. fol. 360.
Enjournée. Villehard. p. 167, en marge.

Adjournement, subst. masc. l’oint du jour. Jour. Assignation. Délai.

Le premier sens est le sens propre. « Vindrent droit à un adjournement, un petit devant soleil « levant, à Mortaigne. » (Froissart. Vol. I, p. 45.) « Vindrent à un adjournement devant le chastel de Mauconseil. Celle matinée faisoit si grande brouée, qu’un arpent de terre ne pouvoit-on veoir loing. » (Id. ibid. p. 214.)

Quant je gis en mon lit endroit l’ajornement
Et j’ois les oiseillons chanter si doucement, etc.
Fabl. MS. du R. no 7218, fol. 270, V° col. 2.

(Voy. Ajornail ci-après.)

Ce mot, de même qu’adjournée ci-dessus, signifioit jour, par métonymie ; c’est la partie pour le tout.

Verrai-jou jà venir l’ajornement.
Ke me peust votre amours eschaoir,
Ke je desir tant débonairement, etc.
Anc. Poët. Fr. MSS. avant 1300, T. III, p. 1200.

De là l’acception particulière d’adjournement, pour désigner le jour où quelqu’un doit comparoitre en justice. Ce mot s’est dit et se dit encore figurément de l’exploit qui fixe le jour de l’assignation. On appeloit « adjournement libellé, la commission de justice pour adjourner, et l’exploit d’adjournement qui contient le thème et libel ; c’est-à-dire, qui contient par écrit la demande, le fait, les fins, conclusions et moyens du de-

  1. prends garde.
  2. au point du jour.
  3. Là-dedans.