Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 2.djvu/154

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

nom de la dame, et ne lui a pas même avoué que ce fût lui qui en fût aimé, mais le vidame de Chartres n’en doute point.

Comme la reine dauphine achevait ces paroles, quelqu’un s’approcha du lit. Madame de Clèves était tournée d’une sorte qui l’empêchait de voir qui c’était ; mais elle n’en douta pas, lorsque madame la dauphine se récria avec un air de gaieté et de surprise : Le voilà lui-même, et je veux lui demander ce qui en est. Madame de Clèves connut bien que c’était le duc de Nemours, comme ce l’était en effet. Sans se tourner de son côté, elle s’avança avec précipitation vers madame la dauphine, et lui dit tout bas qu’il fallait bien se garder de lui parler de cette aventure ; qu’il l’avait confiée au vidame de Chartres, et que ce serait une chose capable de les brouiller. Madame la dauphine lui répondit, en riant, qu’elle était trop prudente, et se retourna vers M. de Nemours. Il était paré pour l’assemblée du soir ; et prenant la parole avec cette grace qui lui était si naturelle : Je crois, madame, dit-il, que je puis penser, sans témérité, que vous parliez de moi quand je suis entré, que vous aviez dessein de me demander quelque chose, et que madame de Clèves s’y oppose. Il est vrai, répondit madame la dauphine ; mais je n’aurai pas pour elle la complaisance que j’ai accoutumé d’avoir. Je veux savoir de vous si une histoire que l’on m’a contée est véritable, et si vous n’êtes pas celui qui êtes amoureux et aimé d’une femme de la cour qui vous cache sa passion avec soin, et qui l’a avouée à son mari.

Le trouble et l’embarras de madame de Clèves