Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 2.djvu/155

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étaient au-delà de tout ce que l’on peut s’imaginer ; et si la mort se fût présentée pour la tirer de cet état, elle l’aurait trouvée agréable. Mais M. de Nemours était encore plus embarrassé, s’il est possible : le discours de madame la dauphine, dont il avait eu lieu de croire qu’il n’était pas haï, en présence de madame de Clèves, qui était la personne de la cour en qui elle avait le plus de confiance, et qui en avait aussi le plus en elle, lui donnait une si grande confusion de pensées bizarres, qu’il lui fut impossible d’être maître de son visage. L’embarras où il voyait madame de Clèves par sa faute, et la pensée du juste sujet qu’il lui donnait de le haïr, lui causa un saisissement qui ne lui permit pas de répondre. Madame la dauphine voyant à quel point il était interdit : Regardez-le, regardez-le, dit-elle à madame de Clèves, et jugez si cette aventure n’est pas la sienne.

Cependant, M. de Nemours, revenant de son premier trouble, et voyant l’importance de sortir d’un pas si dangereux, se rendit maître tout d’un coup de son esprit et de son visage. J’avoue, madame, dit-il, que l’on ne peut être plus surpris et plus affligé que je le suis de l’infidélité que m’a faite le vidame de Chartres, en racontant l’aventure d’un de mes amis que je lui avais confiée. Je pourrais m’en venger, continua-t-il en souriant, avec un air tranquille qui ôta quasi à madame la dauphine les soupçons qu’elle venait d’avoir : il m’a confié des choses qui ne sont pas d’une médiocre importance. Mais, je ne sais, madame, poursuivit-il, pourquoi vous me faites l’honneur de me mêler à cette aventure. Le vidame ne peut pas dire