Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/104

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Cependant les mauvais traitements augmentaient à mesure qu’il plaisait davantage. Il craignit à la fin d’avoir déplu, et il en parla à sa sœur. Je suis persuadée, lui dit madame de Beaumont, que madame de Granson aime son mari plus qu’elle ne croit. Elle est jalouse ; peut-être vous soupçonne-t-elle d’avoir part à des galanteries dont elle est blessée. Voilà ce qui est cause de son chagrin contre vous. Elle est bien injuste, répliqua M. de Canaple, mais je n’en travaillerai pas moins pour son repos. Je vais mettre en usage tout le crédit que j’ai sur son mari pour l’engager à revenir à elle. En vérité, dit en riant madame de Beaumont, un homme qui croit que la vivacité de l’amour finit où le bonheur commence me paraît peu propre à prêcher la fidélité à un mari.

Quelle que soit ma façon de penser, répliqua M. de Canaple, il est bien sûr du moins que je ne pourrais me résoudre à rendre malheureuse une femme dont je serais aimé et que j’aurais mise en droit de compter sur ma tendresse.

Cependant madame de Granson, toujours obligée à voir M. de Canaple, ne pouvait se guérir de son inclination pour lui. Elle résolut de passer une partie de l’été à Vermanton, dans une terre de son mari. M. de Granson, que la présence de sa femme contraignait un peu, consentit sans peine à ce qu’elle voulait ; mais il ne la laissa pas longtemps dans sa solitude. Il se brouilla peu de temps après avec sa maîtresse. M. de Canaple profita de cette conjoncture, et lui représenta si vivement ce qu’il devait à sa femme, qu’il l’obligea de l’aller retrouver.