Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/166

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les soins que nous avons pris, pour conserver la vie d’un si brave homme, n’ont pas été inutiles. Ce que vous avez fait pour me sauver la vie, répliqua M. de Châlons, ne satisferait pas pleinement votre générosité, si vous ne tâchiez encore de diminuer la honte de ma défaite, par les éloges que vous donnez à une bravoure qui m’a si mal servi. Je ne sais, cependant, si je puis me plaindre d’un malheur qui m’a mis à portée de connaître un ennemi si généreux.

Ne me donnez point ce nom, répliqua milord d’Arondel ; nos rois se font la guerre, l’honneur nous attache à leur suite ; mais, lorsque nous n’avons plus les armes à la main, l’humanité reprend ses droits, et la valeur que nous avons employée les uns contre les autres, dans la chaleur du combat, devient un nouveau motif d’estime, lorsqu’il est fini. Celle que j’ai pour vous, n’a pas attendu pour naître, que je vous visse les armes à la main ; votre mérite m’est connu depuis longtemps ; j’ai souhaité cent fois d’avoir un ami tel que vous, et la fortune ne pouvait me servir mieux, que de me donner quelque droit à une amitié dont je connais d’avance tout le prix.

Si je suis digne d’être votre ami, répondit M. de Chalons, si vous avez quelque estime pour moi, vous ne douterez pas que la vie, que vous m’avez conservée avec tant de générosité, ne soit à vous : oui, je suis prêt de la sacrifier à votre service, et ce sera moins pour m’acquitter envers vous, que pour satisfaire à l’inclination et à l’admiration que m’inspire la noblesse de votre procédé. Ne me laissez pas ignorer plus longtemps le nom de mon bienfaiteur. Apprenez-moi, de