Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/201

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Il ne me resta d’espérance que dans les succès de la guerre ; je m’y portai avec tant d’ardeur, et, pour avancer nos conquêtes, je fis des actions si téméraires, et où je m’exposais si visiblement, que le roi fut forcé de me rendre sa confiance. Tout mon espoir était de faire le siège de Calais : la victoire que nous avons remportée nous en a ouvert le chemin ; mais le siège peut être long ; M. de Vienne paraît disposé à défendre sa place jusqu’à la dernière extrémité ; et ce que j’ai appris deux jours avant la bataille ne me permet pas d’en attendre l’événement, et m’oblige à vous demander un prompt secours.

Un prisonnier, qui avait été pris par nos gens, se fit conduire dans ma tente ; je le reconnus pour un nommé Saint-Val, principal domestique de madame de Mailly. Je ne puis vous dire le trouble que cette vue excita en moi ; je n’avais pas la force de lui faire des questions ; il les prévint ; et, après m’avoir prié de faire retirer ceux qui l’avaient introduit : On a voulu, seigneur, me dit-il, se servir de moi, pour la plus noire trahison ; je m’y suis prêté, pour être à portée de vous en avertir. Madame de Mailly, instruite que vous voulez vous marier en France, et que c’est pour cela que vous avez résisté à la volonté d’Édouard, n’a pas douté que vous n’ayez pris des engagements avec mademoiselle de Mailly. Pour empêcher ce mariage, qu’elle ne saurait souffrir, elle m’a donné la commission de m’introduire auprès de vous, sous le prétexte des services que j’ai rendus à mademoiselle de Mailly pour mettre au monde un enfant, dont je dois vous supposer le père ; et le hasard a si bien servi sa malice, qu’elle est