Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/361

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Elle resta dans cette maison aussi long-temps qu’il fallait pour cacher son malheureux état. Elle écrivit encore à M. de Blanchefort ; elle lui manda la naissance d’un garçon dont elle était accouchée ; toutes ses répugnances cédèrent à ce que l’intérêt de cet enfant demandait d’elle ; rien ne fut oublié dans cette lettre, pour exciter la pitié de M. de Blanchefort, et tout fut inutile. Non seulement il ne lui fit aucune réponse ; il ne daigna pas même s’informer où elle était.

Mademoiselle d’Essei, quoique ce procédé l’accablât de la plus vive douleur, ne laissa pas de soutenir le personnage de suppliante pendant près de six mois que son fils vécut ; mais, dès qu’elle l’eut perdu, elle écrivit à M. de Blanchefort sur un ton bien différent. Voici ce que contenait cette lettre.

« La mort de mon fils rompt tous les liens qui m’attachaient à vous ; je n’ai rien oublié pour lui sauver la honte que vous avez attachée à sa naissance. Voilà le motif des démarches que j’ai faites, et que j’ai faites si inutilement. Je souhaite que le repentir fasse naître en vous la vertu, dont vous savez si bien affecter les dehors, tandis que le fond de votre cœur cache des vices si odieux. »

Après avoir écrit cette lettre, mademoiselle d’Essei se crut libre, et elle se disposa à prendre le voile dans l’abbaye du Paraclet. À peine y avait-il deux mois qu’elle était dans le noviciat, quand la femme qui l’avait autrefois amenée dans cette maison y vint avec un homme que son air et une croix de l’ordre de Malthe annonçaient pour un homme de condition.