Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/401

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vers des pleurs dont mes yeux étaient remplis. Il est mort, m’écriai-je après l’avoir lue ! je ne le verrai plus ! Je ne pourrai jamais lui dire que je l’ai toujours aimé. Pourquoi m’a-t-il sauvé la vie ? Que je serais heureuse si je l’avais perdue !

Beauvais (car c’était ce fidèle domestique) pleurait avec moi : sa douleur me le rendait nécessaire ; je ne voulais voir que lui ; je passais les jours et les nuits à lui parler de Barbasan et à m’en faire parler. Je l’obligeais de me dire ce qu’il m’avait déjà dit mille fois.

Il me conta qu’il avait été joindre son maître à Francfort ; qu’il l’avait trouvé plongé dans la plus profonde tristesse ; qu’autorisé par ses longs services, il avait pris la liberté de lui en demander la cause plusieurs fois, et long-temps sans succès ; qu’enfin Barbasan, accablé de ses peines, n’avait pu se refuser la consolation de les lui dire.

Beauvais me répéta alors ce que je savais de la fille du geôlier : il ajouta que Barbasan m’avait vue dans une église ; qu’il avait été d’abord fort éloigné de penser que ce fût moi ; mais que la seule ressemblance lui avait fait une impression si vive, et avait augmenté ses remords de telle sorte, qu’il ne lui avait plus été possible de supporter la vue d’Hippolyte ; qu’il avait été se réfugier chez un Français de sa connaissance ; et que, pressé par son inquiétude, il avait envoyé Beauvais s’informer de cet étranger.

Beauvais, après plusieurs recherches inutiles, avait enfin découvert, par hasard, la femme chez qui j’avais logé. Les détails qu’il apprit d’elle éclaircirent pleine-