Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 12.djvu/145

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obligé de se tenir assis sur son trône pendant quelques heures de la matinée, avec la couronne impériale sur la tête, et d’y rester dans une parfaite immobilité, qui passait pour un augure de la tranquillité de l’empire. Si, par malheur, il lui arrivait de se remuer ou de tourner les yeux vers quelque province, on s’imaginait que la guerre, le feu, la famine et d’autres fléaux terribles ne tarderaient pas à désoler l’empire. On l’a délivré d’une si gênante cérémonie, ou peut-être les daïris eux-mêmes ont-ils secoué ce joug : on se contente de laisser la couronne impériale sur le trône, sous prétexte que dans cette situation, son immobilité, qui est plus sûre, produit les mêmes effets. Chaque jour on apporte la nourriture du daïri dans des vaisseaux neufs. On ne le sert qu’en vaisselle neuve, et d’une extrême propreté, mais d’argile commune, afin que, sans une dépense excessive, on puisse briser tous les jours tout ce qui a paru sur sa table. Les Japonais sont persuadés que la bouche et la gorge des laïques s’enfleraient aussitôt, s’ils avaient mangé dans cette vaisselle vénérable. Il en est de même des habits sacrés du daïri : celui qui les porterait sans sa permission expresse en serait puni par une enflure douloureuse. » Pour concevoir comment il est possible de se prêter à cet excès de dignité un peu importun, il faut croire que le daïri peut bien y déroger quelquefois ; qu’on lui permet d’aller à la garde-robe sans s’y faire porter, et de